LA CO-RESPONSABILITÉ VUE PAR L’ÉQUIPE VALENCIANE D’ACUARIO |
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Enrique LEBRERO Nous devrions réfléchir en premier lieu à quel type de coresponsabilité nous nous référons. La première chose que nous devons réaliser c’est qu’entre médecin et parturiente la responsabilité est fondamentalement de cette dernière, puisqu’elle est l’actrice principale de l’acte sanitaire. Actuellement, dans notre société, la responsabilité de la parturiente et de l’acte est donnée au médecin. C’est le résultat du culte de l’ignorance, la passivité et la peur de la « parturiente », la prépondérance du médecin et son abus de la technologie. En résumé, la méfiance mutuelle est la crise absolue du système santé. C’est à dire, une réelle co-responsabilité sera impossible tant que nous ne changerons pas certains aspects culturels de base, un changement nécessaire surtout pour notre survie. Ces changements pourraient se résumer : développement d’un nouveau concept de santé. La grossesse et l’accouchement démontrent très spécifiquement le style de médecine actuelle et le concept de santé en vigueur ressenti intérieurement par toute la population. Expropriation de la santé est le terme précis. La femme se sent hors de son propre corps, qu’elle ne connaît plus et ne peut donc plus contrôler. C’est ce qui justifie le besoin des médecins et des techniques médicales à tout moment. Cette situation se concrétise dans une dynamique très précise : l’importante ignorance des mécanismes vitaux et processus corporels, malgré l’information, transporte une réaction paranoïaque face aux propres manifestations du corps. Attitude qui est transmise ou médecin, générant une insécurité mutuelle. Insécurité qui produit des attitudes sadomasochistes, avec des personnages bien définis entre le médecin et la « patiente ». Le médecin réagit avec une hyper-activité technologique jusqu’au délire et la femme avec passivité maladive. Dans la grossesse et l’accouchement, cette séquence est illustre car nous parlons de la création de la vie, c’est-à-dire du mécanisme le plus intime et spectaculaire sur lequel l’homme compte pour évoluer. Mais pendant cette expérience vitale, le médecin n’a aucune relation directe avec la femme/le couple, mais à travers des analyses, le contrôle technologique et les statistiques. Et c’est ce monde technologique et « quantifiable » qui risque d’être dangereux pour le bébé, et donc il faut réaliser plus de césariennes pour le sauver. De façon que les résultats de cette co-responsabilité sont plus que désastreux, et nous réussissons à faire de la naissance une torture et une souffrance pour l’enfant, sa mère et sa famille. Et de plus, nous nous plaignons que les femmes ne désirent plus accoucher… Forger un nouveau concept de santé chez les citoyens requiert l’acceptation de la responsabilité personnelle, intransmissible, de la vie et du propre corps. Cette responsabilité est possible seulement à travers une croissance personnelle, qui inclut l’acceptation de la maladie comme clé fondamentale de sa biographie et ainsi permet de comprendre le chemin intime de la guérison. Pour réaliser ce processus d’autogestion de la santé il est nécessaire d’être l’acteur de la vie et donc accepter la vie et la mort. Il est également utile de connaître l’information précise, savoir la chercher et la mettre en pratique régulièrement. Développer un nouveau concept de santé prend en compte la modification radicale de nombreux axiomes et processus médicaux. Il est important d’atteindre un équilibre nouveau entre l’art de guérir et la technique médicale. Un équilibre plus efficace et libérateur. Un nouveau concept de santé doit mettre en pratique, surtout actuellement, les principes d’Hippocrate :
L’obstétrique nouvelle doit être la synthèse de l’art ancien, de la sage femme, plus la savante utilisation de la césarienne (la plus importante découverte thérapeutique concernant la naissance). L’obstétrique nouvelle doit se développer hors des hôpitaux, en générant des lieux de vie mère-enfant, de rencontres et d’aides mutuelles, où se produiraient les naissances et la croissance interactive des bébés. L’obstétrique nouvelle doit respecter l’instinct animal, de mammifère, de la femme. Le développement de l’instinct se base sur la nécessité d’intimité et dans la liberté de mouvement. Il a été démontré qu’une ambiance inconnue, inhospitalière, lumineuse, dans laquelle une femme se sent observée et manipulée, rend difficile l’accouchement. Dans la nouvelle obstétrique, la sage-femme réalisera une tâche fondamentale, de toute façon. Car la sage-femme devra être l’agent de santé le plus important tout au long de la vie d’une femme. Un nouveau concept de santé rend obligatoire d’accepter avec dignité que la vie c’est : naître, grandir, se reproduire et mourir. De nombreux concepts sociaux doivent être changés autour de la naissance. Pour des raisons diverses mais complémentaires, le sexe et la reproduction traversent une grande crise d’identité. Il est nécessaire de renouveler un idéal sexe-reproduction. Actuellement, il faut vivre la grossesse et ses conséquences comme une « thérapie humaine de très haut niveau ». Avoir un enfant c’est l’offrir au monde, en lutte contre l’entropie. Un enfant ne doit pas être un investissement mais un pari sur la vie. Il faut apprendre à accepter la mort comme le revers de la vie. Et un accouchement nous rapproche beaucoup de cette suite qui est difficile à accepter. L’auto-gestion est fondamentale, car la douleur et son expérience est une clé importante pour comprendre la santé. Il est évident que l’expropriation de la santé commence avec l’impossibilité d’assumer la douleur, laissant le médecin pour son contrôle absolu. Mais, de plus, la douleur de l’accouchement est unique en son genre, spéciale. C’est la seule douleur, pour l’espèce humaine, qui annonce la vie, l’espoir. Et elle est réservée aux femmes. Les autres douleurs sont des signes de maladie et de souffrance. Si nous voulons qu’existe une responsabilité véritable et répartie, c’est ces critères indispensables que devraient assumer tous les citoyens. Ceci n’est pas une poésie, ni une agitation politique. On tente uniquement de mettre en place les bases d’un « nouvel ordre » nécessaire pour une meilleure survie. Nous tous, nous pouvons régulièrement faire quelque chose dans ce sens. Surtout, des modifications qui puissent adapter les hôpitaux et les cliniques aux réelles conditions de l’accouchement à la maison sont les bienvenues. Principalement en relation avec l’intimité et la liberté de mouvement de la femme et de sa famille.
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