Com­mu­niqué de presse
Le 13 jan­vi­er 2009

Le Col­lec­tif interas­so­ci­atif sur la nais­sance (CIANE) défend le droit des usagers à l’in­for­ma­tion médi­cale, au con­sen­te­ment éclairé, et à la prise en compte de leurs exi­gences, garants d’une réelle lib­erté de choix lors des déci­sions médi­cales les con­cer­nant per­son­nelle­ment dans le domaine de la péri­na­tal­ité. Dans ce con­texte, il suit avec beau­coup d’at­ten­tion les travaux de recherche visant à une amélio­ra­tion du dépistage anté­na­tal des mal­adies chro­mo­somiques et géné­tiques. Actuelle­ment, les méth­odes employées con­duisent à un impor­tant taux d’am­nio­cen­tès­es qui entraî­nent des risques de perte de foe­tus — pour la plu­part, sans anom­alie géné­tique. Pour cette rai­son, un grand espoir a été investi dans des tech­niques nou­velles qui per­me­t­tront de diag­nos­ti­quer ces mal­adies à par­tir d’un test non-invasif et sans effet sur le foe­tus (une sim­ple prise de sang).

Une des tech­niques les plus promet­teuses à ce jour — et déjà validée depuis fin 2007 pour le diag­nos­tic de l’amy­otro­phie spinale (SMA) — est celle qui s’ap­puie sur le procédé ISET d’iso­la­tion de cel­lules foetales cir­cu­lant dans le sang mater­nel. Une fois isolée, la cel­lule peut fournir toutes les infor­ma­tions, de manière extrême­ment fiable, par sim­ple séquençage de son ADN. Le procédé ISET a été mis au point par l’u­nité INSERM U807 (hôpi­tal Neck­er — Enfants Malades) dirigée par le Prof. Patrizia Pater­li­ni-Bré­chot. En 2006, Le pro­jet « Val­i­da­tion d’une tech­nique inno­vante pour le diag­nos­tic pré­na­tal non-invasif de la tri­somie 21 » a obtenu un finance­ment de l’Agence nationale de la recherche (ANR), sur la base d’un parte­nar­i­at entre les insti­tu­tions publiques et une entre­prise nou­velle­ment créée, Metaganex.

Mais c’est à cette époque que la sit­u­a­tion a com­mencé à se dégrad­er entre les parte­naires privés et publics. Les péripéties de ce con­tentieux ont été nom­breuses, iné­gale­ment médi­atisées, mais les plus sig­ni­fica­tives sont réper­toriées dans un dossier ouvert aux com­men­taires de toutes les parties :
https://cianewiki.naissance.asso.fr/DossierDiagnosticPrenatal

La plus récente inter­ven­tion du CIANE sur ce dossier a con­sisté à recon­tac­ter tous les parte­naires du pro­gramme sur le diag­nos­tic de la tri­somie 21, après l’an­nonce de son annu­la­tion par l’ANR. L’A­gence de presse médi­cale s’est fait l’é­cho de cette déci­sion dans une dépêche du 24 décem­bre : https://cianewiki.naissance.asso.fr/CommuniqueApm24dec2008

Sur les 5 cour­ri­ers expédiés le 19 décem­bre 2008, à ce jour trois seule­ment ont fait l’ob­jet de répons­es en prove­nance de Mme Jacque­line Lecourtier, direc­trice de l’ANR, du Dr. Jean-Paul Bon­ne­font (Hôpi­tal Neck­er) et du Prof. Patrizia Paterlini-Bréchot.

Ces let­tres sont accom­pa­g­nées de pièces jointes que nous vous invi­tons à con­sul­ter pour mieux cern­er les dys­fonc­tion­nements du parte­nar­i­at pub­lic-privé sur ce pro­gramme. Les pre­mières vic­times en sont bien sûr les futurs par­ents qui espéraient pou­voir béné­fici­er de ces tech­niques, une fois validées.

Nous atten­dons encore les avis de MM. Serge Romana (Hôpi­tal Neck­er) et David Znaty (Meta­genex).

Il est par­ti­c­ulière­ment choquant de con­stater que le diag­nos­tic de l’amy­otro­phie spinale (SMA), validé en décem­bre 2007, n’a tou­jours pas été mis à dis­po­si­tion des femmes enceintes, alors même que des finance­ments étaient prévus (Agence de Bio­médecine, AFM…). Le CIANE a dénon­cé cette sit­u­a­tion scan­daleuse dans sa motion du 20 sep­tem­bre 2008 : https://cianewiki.naissance.asso.fr/MotionDiagnosticPrenatalNonInvasif

Des par­ents directe­ment con­fron­tés à cette sit­u­a­tion dra­ma­tique ont man­i­festé leur détresse, leur indig­na­tion, leur colère par­fois, sur une page de témoignages et dans une let­tre ouverte (elle aus­si sans réponse à ce jour) au Prési­dent de la République et à la Min­istre de la Santé :

Le CIane appelle l’As­so­ci­a­tion française con­tre les myopathies (AFM), co-financeur de l’é­tude de val­i­da­tion clin­ique de la méth­ode ISET pour le DPN non invasif de l’amy­otro­phie spinale, et un représen­tant du lab­o­ra­toire de géné­tique médi­cale, co-auteur des arti­cles sur la même méth­ode ISET, à organ­is­er une réu­nion pour déblo­quer la sit­u­a­tion et faire le néces­saire pour que le test DPN non invasif de la SMA soit dans le futur pro­posé aux femmes enceintes à risque d’avoir un enfant malade.

Dans sa réponse au CIANE et un cour­ri­er qu’il a adressé à Mme Pater­li­ni-Bré­chot, le Dr. Bon­ne­font fait état de la “pres­sion con­juguée de nom­breux pro­tag­o­nistes” qui nuit à “la sérénité indis­pens­able à la mise en oeu­vre…” etc. Gageons que les répons­es des autres pro­tag­o­nistes seront plus explicites sur les raisons de ce blocage et la valse-hési­ta­tion du Cen­tre pluridis­ci­plinaire de diag­nos­tic pré­na­tal du site Neck­er. Après avoir soutenu le tra­vail sur le diag­nos­tic non-invasif de la T21, il vient en effet de faire obsta­cle au dépôt du pro­jet de val­i­da­tion répon­dant à l’ap­pel d’of­fres du Pro­gramme hos­pi­tal­ier de recherche clin­ique (PHRC). Un pas en avant, deux pas en arrière !

Il arrive que la recherche bio­médi­cale se mette au ser­vice d’am­bi­tions per­son­nelles ou d’in­térêts com­mer­ci­aux, au détri­ment des citoyens qui en sont les des­ti­nataires — et financeurs pour l’essen­tiel. Pen­dant ce temps, les femmes enceintes de groupes “à risque” n’ont tou­jours pas d’autre choix que le recours à des tech­niques inva­sives avec les dan­gers qu’elles comportent.

Bernard Bel
Ingénieur de recherche et mem­bre du CA du CIANE