Mes­dames, messieurs

J’ai bien reçu votre “mail”. J’e­spère en quelques lignes chang­er l’im­age très néga­tive que vous avez de moi, bien que ce moyen de com­mu­ni­ca­tion ne soit pas idéal pour des sujets aus­si sérieux.

L’équipe qui m’en­toure a la répu­ta­tion de con­naître au mieux les mécan­ismes de l’ac­couche­ment nor­mal et a for­tiori ceux de l’ac­couche­ment pathologique avec, je vous l’ac­corde, des critères que vous pou­vez juger infondés.

Nous avons la répu­ta­tion au CHU de Besançon de faire moins de césari­ennes et d’épi­siotomies que dans le reste du pays. Pour ces raisons, j’in­ter­viens dans de nom­breux col­lo­ques impli­quant sages-femmes et obstétriciens sur l’ex­trac­tion instru­men­tale et sur les taux abusifs d’épi­siotomies (inter­ven­tion au CNGOF décem­bre 2004).

Notre école utilise depuis longtemps la ven­touse qui nous paraît supérieure aux for­ceps en par­ti­c­uli­er pour les lésions périnéales. La “France obstétri­cale” utilise encore plutôt le for­ceps pour des raisons his­toriques et d’en­seigne­ment bien enten­du très cri­ti­quables. Cette ten­dance est en train de s’in­vers­er comme dans le reste du monde.

Le prob­lème de la ven­touse est qu’elle néces­site une par­faite adhé­sion de la patiente; l’ef­fort de poussée doit être con­tem­po­rain de l’ef­fort de trac­tion. Dans ces con­di­tions, le for­ceps est plus adap­té en cas de de péril foetal chez une patiente non “pré­parée”.

“Indocil­ité” n’est pas une insulte. Cela sig­ni­fie pour nous: “ne se lais­sant pas con­duire ou instru­ire”, c’est même une qual­ité de très haut niveau dans cer­tains cas (“Ni putes ni soumis­es”). Il nous arrive d’in­ter­venir au milieu de la nuit sur des patientes trans­férées d’ailleurs qui ne nous con­nais­sent pas et qui “craque­nt”. (2300 accouche­ments par an… c’est aus­si un sujet de discussion…)

Loin de moi l’idée de les juger. Ce que je dis est pure­ment tech­nique: “dans les cas ou le foe­tus est grave­ment men­acé dans sa vie immé­di­ate et dans sa dig­nité future : le for­ceps est supérieur à la ven­touse…” Ce n’est pas une punition.

Cela dit, votre inter­ven­tion me fait réfléchir dans un sens con­struc­tif. Un dia­logue per­ma­nent “usagers, prati­ciens” est incon­tourn­able. J’y suis par­ti­c­ulière­ment ouvert.

Bernadette de Gas­quet, que vous citez, est une amie qui inter­vient régulière­ment dans la for­ma­tion uni­ver­si­taire que nous organ­isons annuelle­ment à Besançon et à Paris pour les futurs obstétriciens. Elle pour­ra vous ras­sur­er sur mes aspi­ra­tions con­cer­nant l’ac­couche­ment. Elle assure par ailleurs la for­ma­tion des sages-femmes de notre ser­vice sur les aspects encore peu dévelop­pés dans les ser­vices uni­ver­si­taires (expul­sion en expi­ra­tion, posi­tions non tra­di­tion­nelles, déambulation…)

En espérant que vous que vous accep­tiez l’idée que je ne suis ni sex­iste ni macho après 32 ans de médecine con­sacrée a la naissance.

Beau­coup de col­lègues de mon âge pensent que leur “cerveau” se féminise sans effort, tout naturelle­ment à force d’être au con­tact des femmes leur de l’ac­couche­ment mais aus­si plus tard lors de leur ménopause car nous vieil­lis­sons ensemble…

J’e­spère vous ren­con­tr­er pour en dis­cuter sans rancoeur…

Je suis con­va­in­cu que nos pen­sées sur ce sujet sont plus con­ver­gentes qu’il n’y paraît.

Cor­diale­ment

Pr R. Maillet
Chef de ser­vice Mater­nité CHU Besançon

PS : con­cer­nant votre dernier para­graphe, il est évi­dent qu’à l’avenir, j’évit­erai d’u­tilis­er des ter­mes poten­tielle­ment offensants.…