L’expérimentation du fonc­tion­nement de Maisons de nais­sance (MdN) con­stitue une des qua­tre pri­or­ités du Plan Péri­na­tal­ité 2005–2007. Un groupe tech­nique pluripro­fes­sion­nel, dans lequel fig­urent des représen­tants des usagers issus du CIANE et de l’UNAF, a été mis en place par la DHOS (direc­tion de l’hospitalisation et de l’organisation des soins) au début de l’année 2005. Il avait pour objec­tif de met­tre en place (idéale­ment) pour fin 2006 un cahi­er des charges fix­ant les modal­ités de cette expéri­men­ta­tion, et surtout d’en fix­er un cadre réglementaire.

Une ving­taine de pro­jets de MdN avaient été élaborés à cet effet par des asso­ci­a­tions de pro­fes­sion­nels et d’usagers. Cer­tains ont fait l’objet de présen­ta­tions et de dis­cus­sions dans l’atelier con­sacré à ce thème aux États généraux de la nais­sance 2006. Une plate­forme com­mune pour la (re)définition d’une mai­son de nais­sance, soumise par le Col­lec­tif MdN, avait été adop­tée par le CIANE.

Aujourd’hui, les usagers ressen­tent une vive inquié­tude à la lec­ture de compte-ren­dus qui font appa­raître un cahi­er des charges de plus en plus con­traig­nant, élim­i­nant d’emblée cer­tains pro­jets jusqu’à ôter toute per­ti­nence sta­tis­tique aux paramètres pris en compte dans l’évaluation de cette expéri­men­ta­tion. Selon les critères actuelle­ment retenus par la DHOS (par­mi lesquels « l’attenance » de la MdN à la mater­nité parte­naire), le nom­bre de pro­jets éli­gi­bles serait de 4 ou 5, chiffre très bas com­par­a­tive­ment au Québec (9 pro­jets) pour un pays comme la France avec plus de 65 mil­lions d’habitants et l’une des plus fortes natal­ités d’Europe (830 000 nais­sances). À titre de com­para­i­son, il existe déjà en Alle­magne plus de 120 maisons de nais­sance qui ne sont pas soumis­es à cette con­di­tion d’attenance. De même, à l’issue de son expéri­men­ta­tion, le Cana­da n’a pas imposé que les MdN soient attenantes ni inté­grées physique­ment à leur mater­nité partenaire.

Au terme de 3 ans d’expérimentation sur des échan­til­lons sta­tis­tiques non sig­ni­fi­cat­ifs, la con­clu­sion sera donc vraisem­blable­ment « qu’on ne peut rien con­clure »… Les adver­saires de ce type de choix auront gag­né du temps et pour­ront con­tin­uer à blo­quer la situation.

Le CIANE s’inquiète de con­stater que l’expérimentation française s’achemine vers la val­i­da­tion pure et sim­ple — sous la désig­na­tion trompeuse de « mai­son de nais­sance » — de « pôles phys­i­ologiques » gérés de manière clas­sique dans le cadre des hôpi­taux. Elle écarterait d’emblée toute idée de ges­tion autonome des MdN aboutis­sant, pour les grossess­es à faible risque, à une redis­tri­b­u­tion des tâch­es entre sages-femmes et obstétriciens. Or, le point fon­da­men­tal de la mise en place de MdN était de ménag­er une sépa­ra­tion claire, tant du point de vue de l’identité juridique, des règles de fonc­tion­nement et des pra­tiques, entre les maisons de nais­sance et les mater­nités clas­siques. (Voir « Enjeux »)

Le faible coût d’investissement sup­posé des pôles phys­i­ologiques inté­grés est un raison­nement économique à courte vue. Il est d’autant plus dis­cutable qu’il masque les économies con­sid­érables que la fil­ière MdN serait sus­cep­ti­ble de génér­er dans l’avenir : en effet, à par­tir des expéri­ences cana­di­ennes et alle­man­des, les mod­éli­sa­tions économiques réal­isées mon­trent que c’est une économie de plus de 750 euros par grossesse qui peut en résul­ter (pour une moyenne de 40 grossess­es annuelle­ment suiv­ies par une sage-femme en MdN). A terme et sur une base min­i­mum annuelle de 25% des nais­sances, soit 200 000 femmes sus­cep­ti­bles de ren­tr­er dans cette fil­ière, on aboutit à plus de 150 mil­lions d’euros par an d’économie. Même si ces gains exi­gent un coût d’investissement au départ, glob­ale­ment sur dix ans cela ne devrait pas excéder 50% des économies générées en une seule année. (Voir « Mod­éli­sa­tion »)

Enfin, il ne faut pas oubli­er que l’hôpital lui-même est por­teur de risques : les infec­tions noso­co­mi­ales sont une réal­ité tou­jours préoc­cu­pante et aux con­séquences par­fois lourdes.

Le CIANE envis­age de se retir­er du groupe de tra­vail de la DHOS car il ne tient pas à cau­tion­ner une démarche con­duisant (con­sciem­ment, ou incon­sciem­ment) à un échec annoncé. 

Documentation

• Enjeux de la créa­tion de Maisons de Nais­sance dans le con­texte français — Man­i­feste du CIANE (13 mars 2007)
• Mod­éli­sa­tion du cal­cul du coût glob­al d’une grossesse en MdN (févri­er 2007)
• Let­tre au Prof.Gérard BRÉART, Con­seiller au Cab­i­net du Min­istre de la San­té et de la sol­i­dar­ité (19 févri­er 2007)
• Mai­son de nais­sance (Wikipedia)
• Propo­si­tions de la mis­sion péri­na­tal­ité (Bréart, Puech et Rozé 2003)
• Plan Péri­na­tal­ité 2005–2007
• Plate­forme Péri­na­tal­ité 2007 — propo­si­tions du CIANE