Suivi de l'évolution du projet de loi de financement de la sécurité sociale PLFSS 2011, article 40 sur la création des maisons de naissance

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Projet de loi, article 40

Dépêche APM 18 octobre 2010 : Le PLFSS 2011 prévoit l'expérimentation de "maisons de naissance"

http://www.localtis.info/cs/ContentServer?c=artVeille&pagename=Localtis/artVeille/artVeille&cid=1250260475791

publié le 18 octobre 2010 Présenté au Conseil des ministres du 13 octobre, le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2011 comporte une mesure qui pourrait bien rouvrir le débat sur l'avenir des maternités des petits hôpitaux. Son article 40 indique en effet qu'"à partir du 1er septembre 2011 et pendant une période de deux ans, le gouvernement est autorisé à engager l'expérimentation de nouveaux modes de prise en charge de soins aux femmes enceintes et aux nouveau-nés au sein de structures dénommées 'maisons de naissance', où des sages-femmes réalisent l'accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse, dans les conditions prévues aux articles L.4151-1 et L.4151-3 [du Code de la santé publique, ndlr]. Ces expérimentations ont une durée maximale de cinq ans". En pratique, ces maisons - qui n'auront pas la qualité d'établissements de santé au sens du Code de la santé publique - assureront une prise en charge comportant une moindre médicalisation de la grossesse et de l'accouchement dit "physiologique" ou sans situation à risque.

La création expérimentale des maisons de naissance n'est pas directement liée aux récentes péripéties autour du projet de décret sur l'activité minimale des blocs chirurgicaux et des maternités des petits hôpitaux (voir nos articles ci-contre). La mesure figurait en effet déjà dans le plan périnatalité 2005-2007. Il est cependant difficile de ne pas y voir un lien, d'autant plus que la mise en oeuvre de ces expérimentations est rendue possible par la loi Hôpital, patients, santé et territoires (HPST) du 21 juillet 2009, qui a étendu le champ de compétence des sages-femmes.

L'article 40 du PLFSS prévoit que la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental sera arrêtée notamment en fonction de l'intérêt et de la qualité du projet et de son intégration dans l'offre de soins régionale en obstétrique. Une fois la maison créée, son fonctionnement pourra être suspendu par le directeur général de l'agence régionale de santé pour les motifs et dans les conditions prévus par l'article L.6122-13 du Code de la santé publique (manquements à la protection de la santé publique ou à la continuité des soins). Le retrait de l'inscription sur la liste des maisons expérimentales pourra, pour sa part, être prononcé par les ministres chargés de la Santé et de la Sécurité sociale en cas de manquement grave et immédiat à la sécurité ou lorsqu'il n'aura pas été remédié aux manquements ayant motivé la suspension. Un décret viendra préciser le fonctionnement de ces maisons, et notamment "les conditions de prise en charge par l'assurance maladie de la rémunération des professionnels, les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons de naissance, ainsi que les modalités d'évaluation de l'expérimentation à son terme".

Le PLFSS précise en effet qu'un premier bilan de l'expérimentation sera établi au 31 décembre 2014 - donc avant la fin du délai de cinq ans prévu pour cette dernière - en vue de décider de la poursuite ou de l'abandon de la démarche. Le gouvernement adressera au Parlement un bilan définitif de l'expérimentation dans l'année qui suivra sa fin.

L'exposé des motifs de l'article 40 du PLFSS n'établit pas de lien entre l'expérimentation des maisons de naissance et la restructuration de l'offre de soins engagée par la loi HPST. Il se contente d'indiquer que "les maisons de naissance sont susceptibles de générer des économies pour l'assurance maladie, dans la mesure où un accouchement dans ce type de structure est moins coûteux que dans un établissement de santé".

Jean-Noël Escudié / PCA

La proposition d'article 40 (texte)

voici l'article 40 du PLFSS tel qu'il a été présenté au Conseil des ministres : http://www.assemblee-nationale.fr/13/projets/pl2854.asp Article 40

Il est rétabli au code de la santé publique un article L. 6122-19 ainsi rédigé :

« Art. L. 6122-19. – À partir du 1er septembre 2011 et pendant une période de deux ans, le Gouvernement est autorisé à engager l’expérimentation de nouveaux modes de prise en charge de soins aux femmes enceintes et aux nouveau-nés au sein de structures dénommées « maisons de naissance » où des sages-femmes réalisent l’accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse, dans les conditions prévues aux articles L. 4151-1 et L. 4151-3. Ces expérimentations ont une durée maximale de cinq ans.

« À cet effet, il est dérogé aux dispositions des articles L. 1434-2, L. 1434-7 et L. 6122-1.

« Les maisons de naissances ne sont pas des établissements de santé au sens de l’article L. 6111-1 et ne sont pas soumises aux dispositions du chapitre II du titre II du livre III de la deuxième partie du présent code.

« Il peut être dérogé aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux modalités d’application de la prise en charge de certains actes inscrits sur la liste prévue à l’article L. 162-1-7 de ce code.

« Par dérogation à l’article L. 162-22-13 du code de la sécurité sociale, les dépenses nécessaires au fonctionnement des maisons de naissance peuvent être prises en charge en tout ou partie par la dotation annuelle prévue à l’article L. 162-22-14 de ce code.

« Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental en fonction notamment de l’intérêt et de la qualité du projet pour l’expérimentation et de son intégration dans l’offre de soins régionale en obstétrique. La suspension de fonctionnement d’une maison de naissance inscrite sur la liste peut être prononcée par le directeur général de l’agence régionale de santé pour les motifs et dans les conditions prévues par l’article L. 6122-13. Le retrait d’inscription à la liste est prononcé par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en cas de manquement grave et immédiat à la sécurité ou lorsqu’il n’a pas été remédié aux manquements ayant motivé la suspension.

« Un premier bilan de l’expérimentation sera établi au 31 décembre 2014 par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en vue de la poursuite ou de l’abandon de l’expérimentation. Le Gouvernement adresse au Parlement un bilan définitif de l’expérimentation dans l’année qui suivra sa fin.

« Les conditions de l’expérimentation et notamment les conditions d’établissement de la liste susmentionnée, les conditions de prise en charge par l’assurance maladie de la rémunération des professionnels, les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons de naissance ainsi que les modalités d’évaluation de l’expérimentation à son terme sont fixées par décret en Conseil d’État. »

Exposé des motifs

Le présent article prévoit, conformément à ce qui avait été inscrit dans le plan périnatalité 2005-2007, l’expérimentation de maisons de naissance assurant une prise en charge comportant une moindre médicalisation de la grossesse et de l’accouchement dit physiologique ou sans situation à risque. L’accouchement pourra y être réalisé par les sages-femmes, en garantissant la sécurité de la mère et de l’enfant et à proximité immédiate du plateau technique d’une maternité.

Les maisons de naissance seront soumises à des règles de fonctionnement et de financement spécifiques qui dérogeront, en tant que nécessaire, aux règles de droit commun prévues par le code de la santé publique.

Les maisons de naissance sont susceptibles de générer des économies pour l’assurance maladie dans la mesure où un accouchement dans ce type de structure est moins coûteux que dans un établissement de santé.

Suppression de l'article 40 adoptés par la commission des affaires sociales de l'assemblée (20 octobre 2010)

(suppression non définitive, l'article doit être discuté en séance plénière, début le 26 octobre)

Liste des amendements déposés par les députés

Pages 90-98

Certains amendements demandent la suppression de l'article, d'autres demandent l'introduction de précisions sur l'attenance aux maternités

Les débats en séance (interventions des députés)

Dépêche APM, 20 octobre 2010 : Les députés s'opposent, en commission, à l'expérimentation des maisons de naissance

PARIS, 20 oct 2010 (AFP) - 16h54 heure de Paris - Les maisons de naissance, permettant d'accoucher dans un cadre moins médicalisé, ne seront pas expérimentées comme prévu en 2011, selon un amendement au projet de loi de financement de la Sécurité sociale (PLFSS) adopté mercredi en commission à l'Assemblée nationale.

La suppression de cette expérimentation prévue dans le texte du gouvernement doit toutefois encore être confirmée en séance publique, la semaine prochaine.

Ces maisons de naissance, où les femmes accouchent sous la responsabilité exclusive des sages-femmes, devaient selon le PLFSS être expérimentées à compter du 1er septembre 2011 pour une période de deux ans, avec un bilan fin 2014.

Mais, selon l'amendement de quatre députés communistes, qui a reçu le soutien de quelques députés UMP et Nouveau Centre, "le statut, l'organisation, le financement et les conditions d'implantation des maisons de naissance sont flous" et les auteurs de l'amendement "sont extrêmement préoccupés par le manque de garanties concernant la sécurité des femmes et des nourrissons".

L'expérimentation de ces maisons de naissance, attendues par de nombreuses sage-femmes et futurs parents mais laissant certains médecins réticents, devait déjà être incluse dans le précédent PLFSS.

Le PLFSS 2010 précisait que la sécurité de la mère et de l'enfant seraient garanties et que l'accouchement serait réalisé "à proximité immédiate du plateau technique d'une maternité". Il était également mentionné que "les maisons de naissance" étaient susceptibles de "générer des économies pour l'assurance maladie".

Selon le plan péri-natalité 2005-2007, cité dans un document de la Dhos sur l'expérimentation des maisons de naissance, ces établissements "se définissent comme le lieu d'accueil de femmes enceintes, du début de leur grossesse jusqu'à leur accouchement, sous la responsabilité exclusive des sages-femmes, dès lors que celui-ci se présente comme a priori normal".

http://hosting.afp.com/clients/assembleenationale/francais/assnat/101020145437.d390az2c.html

Les réactions aux demandes de suppression de l'article 40

Communiqué commun Collectif MdN + ANSFL + Ciane, 21 octobre

Objet : Communiqué de presse CIANE + ANSFL + Collectif MdN

21 octobre 2010

L'article 40 du PLFSS 2011 organise la création des maisons de naissance en France.

Nous déplorons que la Commission des Affaires Sociales ait voté hier un amendement visant le retrait de cet article, amendement qui ne prend pas en compte les résultats des études prouvant la sécurité des prises en charge en maison de naissance, ni les choix réalisés en ce sens part de nombreux autres pays (Canada, Allemagne*, Suisse, Pays-Bas, Belgique ...).

Nous rappelons en outre que ces structures s'adressent à des femmes pour qui les antécédents, la grossesse et le déroulement de l'accouchement sont normaux (ou à bas risque) et qu'il est évidemment prévu de transférer à tout moment vers une maternité partenaire une femme qui sortirait de ce cadre physiologique ; c'est au cœur de la compétence des sages-femmes de juger de l'utilité d'un transfert. De plus, il s'agit d'une première phase d'expérimentation qui sera évaluée.

Enfin, nous insistons sur les multiples intérêts d'ouvrir ce type de structure : - demande des usagers en constante augmentation ; - surcharge des maternités ; - moindre coût pour la Sécurité Sociale

Nous espérons donc que l’article 40 sera maintenu et voté lors des débats en séance plénière qui commencent mardi prochain.

Les différents textes relatifs à la question (PLFSS, amendements ...) sont disponibles sur le site du CIANE : http://ciane.net/MdNArticle40-2011

Pour le Collectif Maisons de Naissance : Sabrina Ben Brahim (Présidente du CALM - Paris)

Pour le CIANE (Collectif Interassociatif Autour de la NaissancE) : Chantal Ducroux (Présidente)

Pour l’ANSFL (Association Nationale des Sages-Femmes Libérales) : Laurence Platel (Présidente)

Dépêche APM du 25 octobre, PLFSS 2011: réactions contrastées au projet de création des maisons de naissance

PARIS, 22 octobre 2010 (APM) - L'expérimentation des maisons de naissance prévue dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale (PLFSS) pour 2011 suscite des réactions contrastées de la part des professionnels de santé et des usagers.

Le projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 (PLFSS) prévoit d'expérimenter les maisons de naissance à partir du 1er septembre 2011 et de réaliser un premier bilan au 31 décembre 2014 (cf dépêche APM CONJD010). Son examen à l'Assemblée nationale doit avoir lieu entre le mardi 26 et le vendredi 29 octobre, puis au Sénat entre le lundi 8 et le samedi 13 novembre, rappelle-t-on.

Toutefois les députés ont adopté mercredi en commission des affaires sociales un amendement visant à supprimer l'article concerné du PLFSS (cf dépêche APM CONJK007).

Interrogé par l'APM vendredi, le Pr Francis Puech, président du Collège national des gynécologues et obstétriciens français (CNGOF), a indiqué que le collège "pren[ait] acte de ce projet d'expérimentation" et qu'il demandait des précisions sur les conditions de mise en place ainsi que sur la localisation des maisons de naissance.

Le terme de "proximité" par rapport au plateau technique, évoqué dans l'exposé des motifs de l'article 40 du PLFSS, laisse selon lui "place à une interprétation".

Le collège demande aussi des précisions sur la prise en charge des assurances professionnelles et les contrats passés avec les établissements de recours -ce qui figurera probablement dans le cahier des charges, a-t-il souligné.

Le collège "souhaitait en tout état de cause être intégré à l'élaboration du cahier des charges, la sélection des dossiers et leur évaluation", en tout cas avoir "sinon un contrôle, du moins une participation à la sélection des dossiers et à l'évaluation de ce projet, s'il a lieu", a indiqué le Pr Puech, précisant qu'aucun nouveau projet de cahier des charges ne leur avait été soumis.

Le CNGOF propose également que soit mise en place une évaluation "en intention de traiter", par des unités d'épidémiologie. Il demande en outre "qu'un comité de surveillance soit organisé pendant l'expérimentation, dont le CNGOF serait participant".

Le Pr Puech rappelle que le CNGOF "continue à donner la priorité à la mise en place d'espaces physiologiques au sein des maternités".

LE CNOSF "SATISFAIT"

Le Conseil national de l'Ordre des sages-femmes se dit "satisfait", dans un communiqué, de voir l'expérimentation des maisons de naissance figurer dans le PLFSS 2011. Ces structures "permettront de diversifier l'offre de soins périnatale et de répondre ainsi à la demande des femmes qui souhaitent une alternative à la prise en charge des grossesses et des accouchements actuellement proposée en France".

L'instance rappelle que des maisons de naissance existent dans plusieurs pays et ont "fait leurs preuves en termes de coût, de satisfaction des usagers et de sécurité" et "occupent une place essentielle dans le système de prise en charge des accouchements physiologiques".

L'Ordre souligne que ces structures sont "destinées à être sous la responsabilité médicale des sages-femmes qui y exerceront en toute autonomie et conformément à leurs compétences légales, ce qui représente la principale garantie de sécurité de ces structures, comme le démontrent toutes les études médicales internationales".

"L'équipement médical dont disposeront ces structures et l'intégration dans un réseau périnatal seront autant de garanties supplémentaires permettant d'assurer la sécurité des femmes et des nouveau-nés", insiste-t-il, espérant que ces caractéristiques soient prises en compte dans le cahier des charges en cours d'élaboration.

De leur côté, dans un communiqué commun, l'Association nationale des sages-femmes libérales (ANSFL), le Collectif interassociatif autour de la naissance (Ciane) et le Collectif maisons de naissance (Collectif des associations porteuses de projet de maisons de naissance en France, représenté par Sabrina Ben Brahim, présidente de l'Association pour la maison de naissance des Bluets, Calm, à Paris) déplorent le vote de l'amendement visant le retrait de l'article du PLFSS.

Cet amendement "ne prend pas en compte les résultats des études prouvant la sécurité des prises en charge en maison de naissance, ni les choix réalisés en ce sens par de nombreux autres pays", estiment ces organisations.

"Nous rappelons en outre que ces structures s'adressent à des femmes pour qui les antécédents, la grossesse et le déroulement de l'accouchement sont normaux (ou à bas risque) et qu'il est évidemment prévu de transférer à tout moment vers une maternité partenaire une femme qui sortirait de ce cadre physiologique; c'est au coeur de la compétence des sages-femmes de juger de l'utilité d'un transfert. De plus, il s'agit d'une première phase d'expérimentation qui sera évaluée".

Les trois organisations avancent comme arguments la demande des usagers "en constante augmentation", la surcharge des maternités et "le moindre coût pour la sécurité sociale".

LA FHP-MCO OPPOSEE AUX "MAISONS ROSES DE NIVEAU 0"

Le syndicat national des établissements privés en médecine, chirurgie et obstétrique (FHP-MCO) s'oppose quant à lui à ce qu'il considère comme des "maisons roses de niveau 0".

"Après la classification des maternités en niveau 1, 2 et 3, voici les maisons roses de niveau 0! La tendance dans ce pays est-elle de développer une médecine à deux vitesses?", s'interroge Lamine Gharbi, président du syndicat national FHP-MCO, dans le communiqué.

Le syndicat estime qu'il n'existe pas de définition "consensuelle" de la notion de "bas risque" et que ces maisons de naissance, structures "autonomes, pilotées par des sages-femmes" seraient "déconnectées des établissements hospitaliers et non soumises aux règlementations et cahier des charges auxquels sont soumises les maternités classiques".

Il rappelle les résultats d'une étude de 2001 montrant que des transferts vers un plateau technique ont lieu dans environ 30% des cas, selon les pays. "Dans ces nombreux cas de transfert, les gynécologues restent nécessaires, les maternités hospitalières publiques et privées également. De surcroît, les coûts de prise en charge sont doublés, auxquels s'ajoutent des coûts de transport".

"La pénurie des gynécologues ne doit pas être réglée par les maisons de naissance en prenant en otage les mamans mais par des réponses au dossier d'assurance en responsabilité civile qui freine de jeunes internes ou dissuade des gynécologues affirmés d'entrer ou rester dans le métier de l'obstétrique", s'insurge le syndicat.

Le syndicat souligne que parmi les 174 maternités privées, plusieurs développent une approche "plus naturelle", "avec notamment des 'salles nature'", où l'accouchement est cependant assuré par le gynécologue qui a suivi la patiente pendant sa grossesse.

La ministre de la santé, Roselyne Bachelot, a indiqué lors de son audition par la commission des affaires sociales de l'Assemblée nationale que ces expérimentations de maisons de naissance ne concerneraient qu'un "faible pourcentage de naissances", rappelle-t-on.

cd/ab/APM polsan redaction@apmnews.com

CDNJM002 22/10/2010 16:43 ACTU GYREP

27 octobre 2010, Communiqué de presse CIANE + ANSFL + Collectif MdN

Communiqué de presse CIANE + ANSFL + Collectif MdN

Suite à notre précédent communiqué du 21 octobre concernant les Maisons de Naissance attenantes prévues par l’article 40 du PLFSS, nous apportons des éléments complémentaires ci-dessous.

Les maisons de naissance présentent les mêmes résultats en terme de sécurité maternelle et périnatale que les structures hospitalières grâce à la sélection (initiale et continue) des grossesses physiologiques et grâce à la mise en œuvre de l’accompagnement global à la naissance.

En effet, les maisons de naissance sont destinées à accueillir uniquement les femmes présentant une « grossesse à bas risque » selon les critères définis par la Haute Autorité de Santé en 2007, le bas risque sera évalué tout au long de la grossesse, et toute modification de ce niveau amènera un transfert vers la maternité partenaire.

D’autre part, dans une maison de naissance, l’accompagnement est global, c’est-à-dire qu’il associe une femme (un couple) et une sage-femme du début de la grossesse à la fin du post partum. Ce suivi personnalisé n’a pas d’équivalent dans les pôles physiologiques que proposent certaines maternités ; il participe à la sécurité de cette prise en charge.

Enfin, nous tenons à souligner que les sages-femmes exercent une profession médicale ; leur formation leur apporte toutes les compétences pour assurer le suivi autonome d’une grossesse et d’un accouchement à bas risque.

Nous espérons donc que l’article 40 sera maintenu et voté lors des débats en séance plénière.

Les différents textes relatifs à la question (PLFSS, amendements ...) sont disponibles sur le site du CIANE : http://ciane.net/MdNArticle40-2011

Pour le Collectif Maisons de Naissance : Sabrina Ben Brahim (Présidente du CALM - Paris) Pour l’ANSFL (Association Nationale des Sages-Femmes Libérales) : Laurence Platel (Présidente)

D'autre part, le CIANE soutient le Collectif Maisons de Naissance dans sa démarche pour faire aboutir les projets de maisons de naissance attenantes.

En parallèle, le CIANE encourage le développement d'alternatives qui répondent aux besoins exprimés par les usagers pour l'accompagnement de la grossesse et de l'accouchement.

Le CIANE tient à rappeler que les maisons de naissance attenantes ne sont qu'une possibilité parmi d'autres en matière d'alternatives, et qu'il continue a défendre d'autres possibilités qui ont fait leurs preuves à l'étranger : les maisons de naissance géographiquement distinctes de la maternité de référence.

Pour le CIANE (Collectif Interassociatif Autour de la NaissancE) : Chantal Ducroux - Schouwey (Présidente)

L'article 40 est finalement adopté par l'Assemblée (avec amendement ministériel) 29 octobre 2010

Compte-rendu intégral des débats

Article 40 (précédemment réservé)

M. le président. La parole est à M. Guy Lefrand, inscrit sur l’article 40.

M. Guy Lefrand. L’article 40 du PLFSS a pour objet de mettre en place l’expérimentation des maisons de naissance.

Comme d’autres collègues, j’ai déposé en commission des affaires sociales un amendement de suppression de cet article, qui a été adopté grâce au vote de commissaires appartenant à tous les groupes politiques de notre assemblée.

Mme Marisol Touraine. Non, pas nous !

M. Guy Lefrand. Dans une période de rationalisation des soins, alors que nous avons assumé la fermeture de nombreuses petites maternités au nom de la sécurité, l’ouverture de ces maisons, dont on ne connaît ni le statut exact ni les modes de financement, nous interpelle.

Madame la ministre, je ne doute pas que vous aurez à cœur de nous éclairer sur ces deux points. Concernant le financement, j’ai lu dans le PLFSS que la dotation de financement des missions d’intérêt général et d’aide à la contractualisation sera sollicitée : cela signifie-t-il que l’on retirera de l’argent à l’hôpital pour le transférer vers ces structures ?

Notre interrogation majeure concerne la sécurité. Les pouvoirs publics ont mis en place des plans de périnatalité successifs afin d’accroître la sécurité des femmes qui accouchent. Selon un rapport de l’INSEE, publié il y a deux jours, « la mortalité infantile a été divisée par trois en trente ans. Au cours des années 80, ces progrès résultaient surtout de la diminution des décès survenant au cours de la première semaine de vie. » Ils sont notamment liés aux conséquences de l’accouchement. L’INSSE constate que, en 2009, la mortalité infantile augmente à nouveau pour atteindre 3,7 décès pour 1 000 naissances vivantes. Elle ajoute que pendant ce temps, cette mortalité « continue de se réduire dans d'autres pays européens. Dans le classement des plus faibles taux de mortalité infantile, la France occupait le cinquième rang en 1999, juste derrière les pays nordiques ; elle se situe, en 2008, à la quatorzième place, derrière la Grèce et l'Espagne ».

Madame la ministre, vous connaissez ces données mieux que moi. Jusqu’à preuve du contraire, nous estimons qu’il y a une contradiction entre la volonté de sécurité et la promotion des maisons de naissances qui sont créées en dehors de l’hôpital ou de toute structure permettant une prise en charge en cas d’urgence réelle. On sait que les risques existent toujours. Pour ma part, j’ai été interne pendant deux ans en néo-natologie ; j’ai été témoin de nombreux problèmes. On rencontre des rétentions de tête dernière, des circulaires du cordon, des hémorragies de la délivrance ; autant de cas qui nécessitent des interventions en urgence.

J’ai bien conscience que les compétences des sages-femmes sont très grandes – Mme Bérangère Poletti nous a parfaitement expliqué ce qu’il en est. Il n’en reste pas moins que la sécurité nous semble aujourd’hui faire défaut pour ce qui concerne les maisons de naissance. Sauf à ce que ces structures soient intégrées à l’hôpital – pourquoi pas ? –, je vois difficilement aujourd’hui comment nous pourrions accepter de valider leur création.

Nous avons été inondés de mails envoyés par des lobbies dont on ne connaît pas vraiment l’origine. Madame la ministre, je vous lis un extrait de l’un d’entre eux : « A Pontoise, la maison de naissance se trouve dans le même bâtiment que la maternité, et comme tout est envisagé, la femme enceinte peut, à tout moment, se retrouver prise en charge par le plateau technique des urgences. Il n’y a qu’un ascenseur à prendre pour se retrouver dans une salle d’opération. C’est beaucoup plus sécurisant qu’un accouchement à domicile. » Voilà ce que demande les lobbies des maisons de naissance.

Mme la ministre, j’espère que nous pourrons nous entendre sur des dispositions qui permettront à quelques centaines de femmes d’expérimenter l’accouchement en maison de naissance à l’intérieur de l’hôpital.

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. En commission, le groupe SRC n’a pas voté la suppression de l’article 40.

Nous avons indiqué que nous n’étions pas opposés au principe posé par cet article. En revanche, en l’état du texte, il nous a semblé que les garanties nécessaires n’étaient pas apportées aux femmes enceintes et aux nourrissons, notamment en termes de sécurité. En conséquence, nous avons estimé ne pas être en mesure de voter le dispositif qui nous était présenté.

Mais nous ne voulons en aucun cas que notre position soit comprise comme un refus de principe de ce dispositif. Il y a en effet aujourd’hui un nombre croissant de femmes qui ont le sentiment que l’accouchement est excessivement médicalisé.

M. Guy Malherbe. 1 % des femmes !

Mme Marisol Touraine. Ce « sentiment » – j’emploie le terme à dessein – n’est pas toujours fondé. On sait bien que l’accouchement n’est pas toujours simple, même s’il s’agit de l’acte le plus naturel qui soit. La diminution du taux de mortalité à la naissance des nourrissons et des mères a constitué un des grands progrès des dernières décennies. La sécurité doit donc aujourd’hui demeurer une exigence.

Nous sommes ainsi confrontés à deux préoccupations qui semblent contradictoires. D’un côté, certaines femmes souhaitent accoucher dans un environnement qui leur semble plus bienveillant, plus accueillant peut-être qu’une salle d’hôpital remplie d’appareils divers. Elles veulent éviter la froideur inévitablement liée aux plateaux techniques performants. De l’autre, il y a la nécessité de tout faire pour que ces femmes ne perdent pas la vie en accouchant.

Certains des amendements présentés nous paraissent difficiles à appliquer. Je pense, par exemple, à celui qui réserve les maisons de naissance aux grossesses qui sont « sans situation à risque ». Le déroulement sans aucun problème d’une grossesse n’exclut en rien un accident au moment de l’accouchement.

Mme Marie-Christine Dalloz et M. Guy Lefrand. C’est vrai !

Mme Marisol Touraine. L’hémorragie de la délivrance, qui a été citée, est un événement gravissime qui peut provoquer la mort de la mère dans des délais extrêmement rapides ; elle demande une intervention médicale en urgence.

En revanche, si ces maisons de naissance sont adossées à des établissements présentant toutes les garanties de sécurité et possédant tous les moyens d’intervention chirurgicale rapide, nous ne nous opposerons pas à une expérimentation.

Néanmoins, nous nous posons certaines questions. Tout d’abord, pourquoi avoir attendu si longtemps pour proposer une telle expérimentation, dont je rappelle qu’elle était inscrite dans le plan périnatalité de 2005 ? Ensuite, il peut paraître contradictoire de vouloir expérimenter des maisons de naissance sans s’assurer que toutes les conditions de sécurité sont réunies au moment où l’on impose la fermeture des hôpitaux de proximité précisément pour des raisons de sécurité. Enfin, nous souhaitons que cette expérimentation ne soit pas présentée comme une source d’économies. En effet, nous ne pourrions pas souscrire à l’idée selon laquelle la sécurité sociale gagnerait au développement de ces maisons de naissance parce que celles-ci seraient des hôpitaux en moins bien et en moins cher.

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Madame la ministre, nous nous sommes prononcés contre cette disposition, pour des raisons liées à la sécurité de la mère et de l’enfant – que je ne peux développer car le temps m’est compté –, mais aussi pour d’autres motifs.

Tout d’abord, je veux dire à mon tour que je comprends et partage la volonté des mamans, ainsi que des papas d’ailleurs, que l’accouchement se déroule dans les conditions les plus naturelles possible, c’est-à-dire dans un environnement peu médicalisé, mais pas démédicalisé car, dans ce cas, la sécurité ne pourrait pas être assurée. L’accouchement doit en effet être rigoureusement surveillé ; il implique de pouvoir réagir immédiatement avec des moyens médicaux, voire chirurgicaux. Il faut avoir ces éléments bien présents à l’esprit et ne pas raconter d’histoires à ce sujet.

Ensuite, votre proposition, madame la ministre, concerne uniquement des établissements privés. Or ces lieux de naissance où seraient réalisés des accouchements dans un environnement le moins médicalisé possible – dès lors que la grossesse se passe bien – peuvent exister aussi bien dans le privé que dans le public. Je ne vois pas pourquoi les femmes qui choisissent d’accoucher dans le public seraient privées de la possibilité d’être accueillies dans ce type de structures. Outre la sécurité, j’y insiste, c’est un point qui pose problème.

J’ajoute que votre proposition me semble en contradiction avec le fait que des maternités ont été fermées parce que les accouchements n’y étaient pas suffisamment nombreux ou sécurisés.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Il n’y a pas de contradiction !

Mme Jacqueline Fraysse. Par ailleurs, je m’étonne, moi aussi, du lobbying auquel nous sommes soumis. Aussi, je veux dire publiquement que nous n’avons jamais légiféré sous la pression de quelque lobby que ce soit…

M. Denis Jacquat, rapporteur de la commission des affaires sociales pour l’assurance vieillesse. Très bien !

Mme Jacqueline Fraysse. …et j’espère que nous ne le ferons pas davantage aujourd’hui, en particulier dans un domaine où, je le répète, la santé, voire la vie, est en jeu.

Enfin, il n’est pas inutile de rappeler que les progrès de la surveillance, des techniques et de la connaissance ont permis d’éviter que de nombreuses mamans ne meurent en accouchant chez elles dans des conditions dramatiques.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Christine Dalloz.

Mme Marie-Christine Dalloz. Madame la ministre, une fois n’est pas coutume, la disposition proposée par le Gouvernement me pose problème, et je souscris aux réflexions de notre excellent collègue Guy Lefrand sur le sujet.

Il faut être clair. Si l’on intègre ces maisons de naissance dans un hôpital, je n’en vois pas l’intérêt, car elles ne permettront pas de réaliser les économies mentionnées dans l’exposé des motifs de l’article 40. (Exclamations sur les bancs du groupe SRC.)

M. Jean Mallot. Eh voilà, les économies !

Mme Marie-Christine Dalloz. Au-delà de ces considérations liées à la sécurité et à la recherche d’économies, je m’interroge sur l’avenir de certains hôpitaux si l’expérimentation est étendue. Je pense notamment à l’hôpital Saint-Claude, qui se situe dans ma circonscription et qui doit son maintien à l’excellente activité de la maternité. Si, demain, on y adosse une maison de naissance, qu’adviendra-t-il de cette structure hospitalière, où beaucoup moins d’actes seront effectués ? On risque ainsi de mettre en péril le maintien d’un hôpital nécessaire au bassin de vie dans lequel il est implanté. Je m’interroge donc sérieusement sur le devenir de cette expérimentation.

M. le président. La parole est à Mme Bérengère Poletti, rapporteure de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure de la commission des affaires sociales pour le secteur médico-social. Mes chers collègues, il faut que vous soyez bien conscients de l’hypermédicalisation de la naissance et de la manière dont on traite les femmes qui accouchent ; elles n’ont pas toujours voix au chapitre. En effet, lorsqu’elles arrivent à la maternité, on les allonge, on leur place le monitoring, on leur pose une péridurale – parfois en leur demandant à peine leur avis –, une perfusion, une seringue électrique compte-gouttes et un brassard de tension automatique.

M. Guy Lefrand. C’est atroce, l’hôpital !

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. Je ne dis pas que c’est atroce, mais certaines femmes souhaiteraient que leur accouchement se passe différemment, et il faut respecter leur souhait, même si on ne le partage pas. Pour ma part, l’environnement médical me sécurise, mais un environnement hypermédicalisé peut générer un stress chez certaines femmes et entraîner parfois des dystocies, c’est-à-dire des difficultés dans l’accouchement, des pathologies, voire un nombre excessif de césariennes. Il faut savoir entendre l’expression de ces femmes, qui souhaitent qu’on leur permette de choisir un environnement moins stressant, plus physiologique.

Bien entendu, il faut veiller à ce que les équipements nécessaires en cas d’urgence se trouvent à proximité ; nous ne sommes pas idiots ou naïfs. Faut-il que ces maisons soient dans l’hôpital ou près de celui-ci ? Je l’ignore, mais, dans de nombreux hôpitaux, les services sont dispersés dans différents pavillons. J’ai travaillé dans un établissement, par exemple, où l’anesthésiste devait traverser tout l’hôpital pour se rendre dans le service.

Par ailleurs, les sages-femmes sont formées. Elles ont des compétences reconnues et apprennent d’ailleurs certains gestes au médecin obstétricien. Elles savent pratiquer une délivrance artificielle, s’occuper d’un nouveau-né. Au reste, pour tout dire, durant les gardes, la nuit ou le week-end, il est assez rare que les médecins soient présents en permanence. N’oublions pas que les sages-femmes exercent une profession médicale. Leur responsabilité est, certes, limitée à leur domaine d’activité, mais elles ont été formées pour réagir à l’urgence.

En conclusion, il serait dommage de renoncer à cette expérimentation et de ne pas offrir à des femmes ce qu’elles iront chercher ailleurs. Lorsque j’exerçais en libéral, certaines femmes m’ont demandé d’accoucher à domicile. J’ai refusé, car j’estime que c’est dangereux. Mais si, grâce à cette expérimentation, on répond à leur demande dans des conditions de sécurité satisfaisantes, nous aurons, me semble-t-il, progressé.

M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. Certes, je n’ai aucune compétence médicale, mais je m’interroge. Il est vrai que les méthodes et les modalités d’accouchement ont évolué au fil du temps et les maisons de naissance sont peut-être une nouveauté à cet égard. Toutefois, on est en droit de se poser trois questions.

Premièrement, s’il s’agit d’une nouvelle méthode d’accouchement, pourquoi ne pourrait-elle pas être pratiquée dans les maternités existantes ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. On accouchera toujours de la même façon !

M. Daniel Garrigue. Pour quelle raison faudrait-il créer une nouvelle structure alors que, dans le passé, différentes méthodes ont pu être développées dans le même cadre ?

Deuxièmement, si l’on décide de développer les maisons de naissance, toutes les femmes qui le souhaitent pourront-elles y accéder ? Il en va de l’égalité devant les soins.

Troisièmement, comme l’a indiqué l’une de nos collègues, cette expérimentation ne risque-t-elle pas de remettre en cause les efforts réalisés dans certaines villes pour regrouper les activités liées à la maternité ? Je pense en particulier aux pôles mère-enfant, qui permettent le maintien des établissements en assurant un certain seuil d’activité.

M. le président. La parole est à Mme Marie-Françoise Clergeau.

Mme Marie-Françoise Clergeau. Il s’agit d’un dossier important qui mérite que l’on y consacre plus de temps que celui qui nous est imparti dans le cadre de la discussion de cet article 40.

Il existe déjà, dans certains hôpitaux – à Nantes, notamment –, des maisons de la naissance où les femmes, accompagnées par des sages-femmes et des médecins, choisissent la façon dont elles veulent accoucher. Ce type de structures pourrait être généralisé. En tout cas, il me semble nécessaire de prendre le temps d’étudier ce qui se fait dans les maternités, ainsi que les expérimentations reconnues.

Par ailleurs – et c’est une question qui n’a pas été évoquée –, qui financera les bâtiments qui accueilleront ces maisons de la naissance ? Si c’est l’hôpital, cela pose problème. Si ce sont les sages-femmes, cela me paraît matériellement difficile. Enfin, si ce sont les collectivités, elles sont actuellement tellement étranglées par l’État qu’il ne me paraît pas envisageable de les mettre à contribution.

M. le président. La parole est à Mme Valérie Boyer.

Mme Valérie Boyer. Le débat au sujet des maisons de naissance a été très animé. Personnellement, je préfère que chaque maison de naissance soit adossée à un établissement de santé, c’est-à-dire à proximité immédiate, voire à l’intérieur de l’établissement de santé. Le fait que les choses aient parfois été présentées de manière un peu caricaturale a plutôt nui à cette idée.

L’accouchement n’étant pas une maladie, nous devons avoir pour objectif de faire en sorte que les femmes puissent accoucher comme elles le souhaitent, sans pour autant que la sécurité soit compromise. L’amendement n° 713 rectifié du Gouvernement, que nous allons examiner dans quelques instants, me paraît tout à fait répondre à cette exigence.

M. le président. La parole est à M. Jean-Luc Préel.

M. Jean-Luc Préel. Je vais m’exprimer maintenant sur l’article 40, ce qui me permettra d’intervenir moins longuement sur l’amendement de suppression que j’ai déposé.

L’idée de la maison de naissance est intéressante. Durant des siècles, les femmes ont accouché à domicile, et je pense qu’au sein de notre hémicycle, nombre d’entre nous sont nés de cette façon. Le souhait d’un environnement sympathique est bien compréhensible, et je crois qu’il faut laisser aux femmes le choix du lieu où elles souhaitent accoucher. Comme Mme Poletti l’a souligné tout à l’heure, la plupart des accouchements sont effectués par les sages-femmes, qui ne font appel à l’obstétricien qu’après un certain temps ou lorsque surviennent des difficultés.

Le problème qui se pose à nous aujourd’hui est celui de la sécurité lors de l’accouchement, pour la femme comme pour l’enfant. C’est ce qui a poussé le ministère à poser certains critères, à savoir la présence d’un anesthésiste, d’un chirurgien, d’un pédiatre, voire d’un service de réanimation pour la mère et l’enfant, et à fermer de très nombreuses petites maternités ne répondant pas à ces critères.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Pas si nombreuses, tout de même !

M. Jean-Luc Préel. Comme vous voudrez, madame la ministre : le Gouvernement a donc fermé des maternités dites « de proximité »…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Voilà, c’est mieux !

M. Jean-Luc Préel. …mais le problème reste le même : la sécurité.

Créer des maisons de naissance, pourquoi pas ? Notre rapporteur a déposé un amendement visant les grossesses ne présentant pas de risques. Mais le problème n’est pas la grossesse, c’est l’accouchement ! Or, il est toujours difficile de prévoir si un accouchement sera difficile ou non, les problèmes éventuels – mauvaise position du cordon ombilical, hémorragie de la délivrance – ne se révélant souvent qu’au dernier moment.

La solution proposée par le Gouvernement consiste à adosser chaque maison de naissance à un hôpital – certains vont d’ailleurs plus loin en demandant que la maison de naissance soit située à l’intérieur même de l’hôpital. Pour moi, il convient de placer la maison de naissance au sein d’un service d’obstétrique, auquel cas il ne reste plus qu’à aménager les services d’obstétrique afin de permettre que les accouchements, qui seront effectués par les sages-femmes, s’y déroulent dans de bonnes conditions.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Monsieur le président, mesdames et messieurs les députés, je veux tout d’abord vous remercier pour la qualité du débat que nous venons d’avoir. J’ai le sentiment que chacune et chacun d’entre vous n’a été habité que par un seul souci, celui de la santé des femmes et des enfants.

Je le dis clairement, l’expérimentation de la maison de naissance n’est pas une alternative à l’hôpital, elle n’a pas pour but de créer des maternités de moindre qualité, ni de s’engager dans une démarche inspirée par la volonté de faire des économies. La création des maisons de naissance n’entre absolument pas en contradiction avec la politique de sécurité que je mène au sujet des maternités, des plateaux techniques et des personnels, qui doivent accueillir les femmes de la meilleure façon. C’est grâce à cette politique de sécurité que nous avons considérablement réduit la mortalité infantile dans tous les pays occidentaux.

Quel est notre objectif ? Nous savons qu’un certain nombre de femmes souhaitent accoucher de manière plus « naturelle » – j’assortis ce terme de tous les guillemets du monde, car je pense que l’on peut accoucher de manière très naturelle sur un plateau technique. Nous constatons qu’au motif de cette démarche « naturaliste », ont fleuri un certain nombre de structures qui ne sont pas toutes de qualité.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. Exact !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Parfois, la présence de prétendus « professionnels de santé » qui, en réalité, ne possédaient pas toutes les qualifications requises, a posé des problèmes. Je pense que mon rôle de ministre de la santé, et notre rôle de législateur, est de fournir une offre de soins permettant de répondre en toute sécurité aux besoins exprimés, plutôt que de voir se développer des structures alternatives de moindre qualité qui mettraient la vie des femmes et des enfants en danger.

Quelles mesures pouvons-nous prendre en matière de sécurité ? Je veux que les maisons de naissance fonctionnent dans un cadre hospitalier. Je vais aller beaucoup plus loin que certains : pour moi, il ne suffit pas qu’elles soient situées à l’intérieur d’un hôpital, il faut qu’elles soient attenantes à une maternité – je proposerai un amendement en ce sens. De cette façon, en cas de problèmes lors de l’accouchement, il n’y aura pas de difficultés de transport. Nombre de nos hôpitaux, notamment certains établissements parisiens datant des xviiie et xixe siècles, sont en effet bâtis sur plusieurs dizaines d’hectares selon une structure pavillonnaire, ce qui nécessite de pousser des brancards dans les couloirs sur des kilomètres pour passer d’une unité à une autre.

M. Denis Jacquat, rapporteur et Mme Bérengère Poletti, rapporteure. C’est vrai !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Je déposerai donc un amendement visant à ce que les maisons de naissance soient attenantes au plateau technique de la maternité.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. Très bien !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. J’ai bien entendu également certains d’entre vous – M. Garrigue, Mme Dalloz – s’inquiéter du fait que l’on puisse assister à un phénomène d’« exvasation » des actes : les accouchements ne seraient plus comptabilisés comme des actes réalisés au sein de l’hôpital, ce qui pourrait conduire à remettre en cause certaines maternités. Non ! Les accouchements effectués dans le cadre d’une structure hospitalière seront évidemment comptabilisés au titre de l’activité de la maternité de cette structure. Afin d’écarter tout risque, je déposerai un amendement en ce sens.

Bien entendu, la mise en place de maisons de naissance est une démarche expérimentale nécessitant de procéder à des surveillances, des évaluations et des comptes rendus. Nombre d’entre nous sont des mères – ou des pères, qui sont également concernés – et ce n’est donc pas seulement en tant que responsables politiques que nous nous sentons interpellés : il est normal que nous nous posions des questions, auxquelles l’expérimentation doit répondre. Pourquoi avons-nous attendu alors que, comme l’a souligné Mme Touraine, les maisons de naissance figuraient déjà dans le plan de 2005 ? Justement parce que nous avons d’abord consulté un certain nombre de structures et de spécialistes, en particulier du CNM, afin de recueillir leur avis sur cette démarche expérimentale.

Bien entendu, les textes que nous vous proposons ne sont pas « pour solde de tout compte » : ils appellent à la mise en œuvre d’un certain nombre de procédures méthodologiques. L’ouverture des maisons de naissance va donner lieu à un décret en Conseil d’État précisant les modalités de cette expérimentation et établissant le cahier des charges auquel devront se conformer les sites candidats. Un projet de texte, en cours d’élaboration, va être transmis au Conseil d’État après avis de la section sanitaire du Comité national de l’organisation sanitaire et sociale. Des médecins, des sages-femmes, des spécialistes de la santé natale, périnatale et maternelle vont être consultés…

M. Maxime Gremetz. Il n’y en a pas assez à l’hôpital !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. …afin que ce dossier soit constitué le plus sérieusement possible.

L’article 40 prévoit les modalités d’agrément des sites expérimentateurs mais aussi, ce qui est important, la possibilité de retirer les autorisations ou de suspendre l’expérimentation. Bien entendu, si vous acceptez cette expérimentation, le bilan que j’ai évoqué fera l’objet d’une transmission au Parlement afin que nous puissions suivre cette affaire en continu.

Je crois que nous avons ouvert une possibilité aux femmes qui le souhaitent et pris toutes les mesures de sécurité nécessaires. Les arguments et les interrogations que vous avez exprimés les uns et les autres sont parfaitement recevables, et j’entends y répondre dans un dialogue ouvert. (Applaudissements sur les bancs du groupe UMP.)

M. Denis Jacquat, rapporteur. Très bien !

M. le président. Je suis saisi de trois amendements identiques, nos 155, 335 et 441.

La parole est à M. le rapporteur, pour soutenir l’amendement n° 155.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. En tant que rapporteur sur l’article 40, j’ai étudié de près cet article et reçu tous les acteurs concernés. J’ai ainsi pu constater que la décision de créer les maisons de naissance n’a pas été prise à la va-vite. Elle est conçue comme une alternative et s’adresse uniquement aux femmes qui souhaiteraient en faire le choix. Comme l’a rappelé Guy Lefrand, les maisons de naissance existent déjà dans d’autres pays, notamment en Belgique, au Canada et en Allemagne. Depuis sept ans, les services de l’État étudient ce dossier – notamment sur la base du plan de périnatalité 2005-2007, qui a également fait partie de mes documents de travail – et des projets ont été préparés. On ne peut donc pas dire que cette expérimentation se fasse dans l’improvisation.

Un cahier des charges très précis prévoit les conditions de sécurité, l’insertion des maisons de naissance dans un réseau de périnatalité, le passage obligatoire d’une convention avec une maternité, donc un cadre très strict. L’accouchement en maison de naissance est ainsi parfaitement sécurisé et doit permettre d’éviter qu’il y ait encore, comme c’est le cas actuellement, des accouchements à domicile souvent synonymes d’insécurité.

Au cours du débat en commission, madame la ministre, les commissaires ont exprimé des inquiétudes au sujet du lieu géographique et de la sécurité médicale – deux points sur lesquels vous venez de nous répondre –, ainsi que du financement. Ils ont donc rejeté l’article 40, ce qui justifie l’existence de l’amendement n° 155, visant à supprimer cet article.

M. le président. Votre amendement n° 335 est-il défendu, monsieur Préel ?

M. Jean-Luc Préel. En effet, et je remercie Mme la ministre pour les précisions qu’elle nous a apportées, qui me conduisent à retirer mon amendement. J’attire cependant votre attention sur le fait que dans votre amendement, madame la ministre, vous évoquez la nécessité pour les maisons de naissance d’être attenantes à un établissement de santé, alors que vous venez d’indiquer que vous souhaitiez que les maisons de naissance soient attenantes au plateau technique d’une maternité.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Oui !

M. Jean-Luc Préel. Je vous proposerai donc un sous-amendement visant à préciser que les maisons de naissance doivent être attenantes à un service d’obstétrique.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. D’accord !

M. le président. Si je peux me permettre cette suggestion, il serait peut-être plus simple que Mme la ministre corrige elle-même son amendement. Qu’en pensez-vous, madame la ministre ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. En effet, cela me paraît préférable.

(L'amendement n° 335 est retiré.)

M. le président. En attendant que vous fassiez parvenir votre rectification à la présidence, madame la ministre, la parole est à Mme Jacqueline Fraysse, pour soutenir l’amendement n° 441.

Mme Jacqueline Fraysse. J’ai bien entendu les arguments avancés par Mme la ministre et je l’en remercie. Elle a apporté quelques éclaircissements sur des questions que nous sommes sans doute nombreux à nous poser, notamment celles du lieu et de la sécurité. En revanche, elle n’a pas fourni, selon moi, de précisions suffisantes au sujet du financement des maisons de naissance : qui va payer l’installation et le fonctionnement de ces lieux ?

Surtout, je ne comprends pas pourquoi cette expérimentation serait interdite au secteur public : pourquoi ne la propose-t-on que dans un cadre privé ? C’est une question fondamentale et qui en suggère d’autres, mais je ne veux pas allonger les débats. Toujours est-il que cette démarche est assez curieuse ; donnez-nous-en acte !

Par ailleurs, je continue à m’interroger sur certains aspects. J’ai vu dans votre amendement, madame la ministre, que les personnels d’un type d’établissements pourront travailler dans l’autre. Cela pose-t-il des problèmes de statut ? Si un établissement privé est adossé à un établissement public, cela pose-t-il un problème pour les personnels de l’un ou de l’autre ? D’ailleurs, je ne sais pas s’il est possible d’adosser la maison de naissance privée que vous envisagez à une maternité publique.

Ce sont autant de questions qui restent posées, et encore je n’insiste pas sur la sécurité, qui demeure quand même une préoccupation majeure.

Je continue donc à m’interroger sur de nombreux points. Pour ces raisons, nous maintenons notre demande de suppression de cet article, dans l’attente d’éventuels travaux approfondis.

M. le président. Monsieur Door, l’amendement n° 155 est-il maintenu ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Je crois que Mme la ministre a répondu aux trois points qui intéressaient les commissaires, donc je retire mon amendement.

(L'amendement n° 155 est retiré.)

(L'amendement n° 441 n'est pas adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 241.

La parole est à M. Jean-Pierre Door, rapporteur, pour le soutenir.

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Cet amendement va dans le sens de ce que disait Mme la ministre. Je suis donc prêt à le retirer.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Même si M. Door s’apprête à retirer cet amendement, je voudrais en dire un mot car cela fait partie du débat général sur l’article.

Bien entendu, on peut constater des situations à risque au moment de l’accouchement.

M. Philippe Vitel. Eh oui ! Cela peut arriver jusqu’au dernier moment.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Mais, par un redoublement de sécurité, on exclut aussi de la démarche les grossesses de type pathologique, dans lesquelles on peut détecter un certain nombre de difficultés en raison soit de l’état de la patiente, soit de ses accouchements antérieurs. Cela n’exclut pas, évidemment, la démarche de sécurité qui est appliquée au moment de l’accouchement. Il ne faut donc pas considérer, là non plus, que l’on est quitte une fois qu’ont été exclus les accouchements qui s’annoncent pathologiques ou difficiles.

(L'amendement n° 241 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi de deux amendements, nos 713 rectifié et 242, pouvant être soumis à une discussion commune.

La parole est à Mme la ministre, pour présenter l’amendement n° 713 rectifié.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Comme je viens de le dire, je vais rectifier cet amendement pour aller dans le sens de Jean-Luc Préel.

Je vous propose donc le texte suivant :

« Le décret en Conseil d’État visé au dernier alinéa du présent article précise, notamment, que la maison de naissance doit être attenante à une structure autorisée à l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle doit obligatoirement passer une convention. »

« L’activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de la structure autorisée à l’activité de gynécologie-obstétrique attenante. »

Vous voyez, madame Dalloz, je reprends l’idée de comptabilité.

Mme Marie-Christine Dalloz. Parfait !

M. le président. Il s’agit donc maintenant d’un amendement n° 713, deuxième rectification.

Quel est l’avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Cet amendement du Gouvernement est très complet. Cela me permet de retirer l’amendement n° 242, qui allait exactement dans le même sens, puisqu’il parlait de convention avec un établissement de santé autorisé à l’activité de gynécologie-obstétrique. L’amendement du Gouvernement étant plus complet, je retire l’amendement n° 242 et donne un avis favorable à l’amendement n° 713, deuxième rectification.

(L'amendement n° 242 est retiré.)

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. La rectification de l’amendement va évidemment dans le bon sens en apportant des précisions utiles. Un certain nombre d’interrogations demeurent néanmoins, notamment sur la question de savoir qui porte l’investissement de ces maisons.

Est-ce à dire qu’une association, par exemple, peut porter le projet, à charge pour elle de trouver un établissement de santé répondant aux critères indiqués ? Est-ce que tel ou tel CHU – pour prendre l’autre extrême – peut décider de constituer une maison de naissance à l’intérieur de son service d’obstétrique, en y affectant des personnels qui seraient volontaires ? Il nous semble qu’il y a là un flou sur le portage juridique de la structure.

De notre point de vue, les améliorations que vous avez apportées vont dans le bon sens. Les questions de sécurité ont été clarifiées, mais un certain nombre d’autres n’ont pas reçu de réponse. À ce stade, nous en restons donc à notre position, qui est de ne pas prendre part au vote. Nous ne nous opposons pas du tout, je l’ai dit, à cet article 40, et la discussion a plutôt fait progresser les choses, mais il y a encore des zones d’ombre.

M. le président. Un certain nombre d’orateurs ont demandé la parole, ce que n’autorise pas le règlement, comme tout le monde le sait, mais comme ce débat est important je vais permettre à chacun de s’exprimer. En échange, je ferai respecter le temps de deux minutes pour chaque intervention.

La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Les possibilités de financement sont très larges. Cela peut être porté par une association ou par l’établissement hospitalier lui-même.

M. Philippe Vitel. Ah ! Bonne nouvelle.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. À ce moment-là, une convention s’établit entre l’établissement de santé et la structure. Il n’y a pas de définition préalable et, de toute façon, nous sommes dans une démarche d’expérimentation, qui est limitée. Nous attendons les porteurs de projet éventuels.

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz.

M. Maxime Gremetz. Je me doutais que ce sujet ferait l’objet d’un grand débat : il y a un tel lobbying !

Mme Marisol Touraine. Oh !

M. Maxime Gremetz. Ce que je dis ne vous plaît pas, madame Touraine ? Vous avez le droit d’être d’accord avec Mme la ministre, mais ce n’est pas pour autant que vous avez à porter des jugements sur la position des autres. Vous ne vous étiez pas associée à la demande de suppression de l’article, contrairement à tous les autres. On a donc compris votre position, mais il faut aussi accepter la contestation !

Moi, franchement, je m’étonne. Dans la Somme, on supprime toutes les maternités les unes après les autres ! Et vous venez nous dire que l’on va créer des maisons de naissance ! Arrêtez, madame la ministre !

Je vous pose la question : combien va-t-on en avoir, en Picardie, pour remplacer les dix-huit maternités qui ont été supprimées parce qu’elles n’avaient pas assez de patientes et ne faisaient pas assez d’accouchements ?

M. Bertrand Pancher. Et surtout parce qu’elles étaient dangereuses !

M. Maxime Gremetz. Nous avons huit cents communes et toutes les femmes sont obligées de venir à l’hôpital – quand elles ont le temps d’y arriver, car certaines accouchent même au bord de la route ! (Exclamations et rires.) Ne plaisantez pas avec ce sujet ! Je pourrais d’ailleurs vous donner des exemples. En plus, ce sont les pompiers qui les accouchent sur la route, parce qu’il faut faire 80 kilomètres pour atteindre la maternité. Qu’est-ce que c’est que cette situation ?

M. le président. Monsieur Gremetz, il faut conclure.

M. Maxime Gremetz. On veut encore supprimer une maternité à Doullens, par exemple.

M. le président. Veuillez conclure, monsieur Gremetz, sinon je vais être obligé de vous retirer la parole.

M. Maxime Gremetz. Je conclus en disant que je souhaite voir votre amendement, madame la ministre. Le règlement prévoit que, quand on rectifie un amendement, on peut en prendre connaissance par écrit.

Enfin, nous allons ouvrir une enquête sur le lobbying qui est derrière tout cela. Des intérêts extraordinaires sont en jeu.

M. le président. La parole est à M. Daniel Garrigue.

M. Daniel Garrigue. J’ai peu de compétences dans ce domaine, même si je suis l’élu d’une circonscription qui a été représentée, dans le passé, par le fondateur de la gynécologie, Samuel Pozzi.

Mme Bérengère Poletti, rapporteure. C’est vrai !

M. Daniel Garrigue. Ce qui me gêne dans ce débat sur les maisons de naissance, c’est qu’une distinction n’apparaît pas clairement : est-ce que l’élément dominant est la méthode, ou bien la structure ? Si c’est la méthode, s’il s’agit d’une nouvelle méthode d’accouchement, je ne vois vraiment pas pour quelle raison elle ne peut pas être mise en place dans les maternités ou les services d’obstétrique existants.

M. Maxime Gremetz. Voilà !

Mme Jacqueline Fraysse. Absolument !

M. Daniel Garrigue. Si c’est la structure, il faut vraiment que l’on explique pour quelle raison on est obligé de créer une structure particulière, ce qui est quand même, il faut le reconnaître, un petit peu choquant étant donné que toute la politique conduite depuis des années a constitué à regrouper les maternités.

M. Maxime Gremetz. C’est le bon sens !

M. le président. Monsieur Gremetz, vous n’avez pas la parole.

M. Maxime Gremetz. Eh bien, je la prends quand même !

M. le président. Non, vous ne la prenez pas. Ici le règlement est valable pour tous les députés et sur tous les bancs.

La parole est à M. Guy Lefrand.

M. Guy Lefrand. Merci, monsieur le président. Je voudrais commencer par vous féliciter de la qualité de votre présidence, aujourd’hui comme hier. Nous ne pouvons que nous en réjouir. (Applaudissements sur divers bancs.)

On a parlé, dans nos débats, de caricature. Il faut faire attention que la caricature ne soit ni d’un côté ni de l’autre. Il n’est pas monstrueux d’aller à l’hôpital,…

Mme Jacqueline Fraysse. Tout à fait !

M. Guy Lefrand. …pas plus qu’il ne le sera d’entrer dans une autre structure. Il faut donc faire attention à ce que l’on dit : aller à l’hôpital pour accoucher, ce n’est pas toujours si terrible et inquiétant que cela.

On parle de démédicaliser l’accouchement, mais n’oublions pas que le métier de sage-femme fait partie des professions médicales. Dès lors, donner plus de pouvoir aux sages-femmes, ce n’est pas démédicaliser, c’est transférer un peu la médicalisation.

Je voudrais simplement vous poser deux questions, madame la ministre, concernant la responsabilité. Si l’on favorise le développement de ces accouchements par des sages-femmes libérales, qu’en est-il de la responsabilité civile professionnelle ? Il y a un risque d’augmentation du coût des assurances pour les sages-femmes. Est-ce que cela a été étudié ?

Nous avons bien pris connaissance de votre amendement, nous y souscrivons et nous vous remercions encore une fois des échanges que nous avons eus et de la qualité de votre écoute.

Je voudrais également m’assurer, même si vous avez déjà répondu en partie à cette question, que la « structure » dont il est question, c’est bien le service : la maison de naissance est adossée au service de gynécologie-obstétrique, c’est bien cela ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. C’est cela.

M. Guy Lefrand. Enfin, M. Gremetz posait la question des lobbies. Il faudrait peut-être évacuer la question sous-jacente de la possible intervention de certaines sectes, qui peuvent avoir intérêt à favoriser ce type de dispositifs. Avez-vous des réponses à nous apporter sur ce point ?

M. le président. La parole est à M. Guy Malherbe.

M. Guy Malherbe. La question de la responsabilité civile n’a pas encore été évoquée. Or on sait qu’un accouchement s’est bien déroulé une fois qu’il est terminé ; avant, on n’en sait rien. Si tout s’est bien passé, on sable le champagne et tout le monde est heureux. Hélas, dans certains cas, les accouchements se passent mal, les familles poursuivent les obstétriciens, et on se retrouve devant les tribunaux : aujourd’hui, les gynécologues-obstétriciens doivent s’acquitter de primes d’assurances extrêmement élevées, qui posent problème à la profession.

En l’occurrence, je voudrais savoir qui sera responsable : l’établissement qui accueille ou les personnes qui auront accompli l’acte médical ?

M. Dominique Tian. Ou l’association !

M. le président. La parole est à Mme Marisol Touraine.

Mme Marisol Touraine. Je dis très rapidement que, la discussion faisant progresser notre réflexion, nous avons modifié notre position : la majorité de notre groupe votera le dispositif, tandis que certains s’abstiendront.

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. La question que vous posez sur les sectes est extrêmement importante ; ayant moi-même fait partie, dans une législature antérieure, d’une mission d’enquête sur les sectes, je suis très mobilisée sur ce sujet.

C’est justement parce que certaines sectes interviennent dans le domaine de l’accouchement dit « naturel » que je veux encadrer ces pratiques. C’est si nous ne les encadrons pas que nous laissons aux sectes les mains libres pour mettre en place des structures qui, au motif de répondre au désir des certaines femmes, les mettent sous influence !

La démarche que je vous propose représente donc la meilleure façon de lutter contre les dérives sectaires.

Monsieur Garrigue, vous m’interrogez sur les méthodes d’accouchement. Elles sont absolument identiques ! Aucune méthode nouvelle n’est mise en œuvre. Ce qui change, c’est que l’accueil est différent, et qu’il est possible d’associer des professionnels libéraux, à proximité d’une structure hospitalière, afin d’apporter aux femmes les meilleures garanties possibles.

Sur la question de la responsabilité civile professionnelle, tout dépend de la structure qui sera recommandée. Si la maison de naissance est installée à l’instigation d’un hôpital, dans un service hospitalier, avec du personnel hospitalier, c’est la responsabilité civile de l’établissement qui sera en jeu – comme cela existe d’ailleurs dans certaines structures, déjà mentionnées, qui sont d’ores et déjà ouvertes. Si on est dans le cadre d’une structure de type associatif, c’est la responsabilité civile des professionnels qui sera mise en cause.

Nous venons d’ailleurs d’accepter un amendement qui étend les dispositions de la responsabilité civile professionnelle aux sages-femmes. Il y a une très bonne coordination entre cet amendement et la possibilité d’expérimentation des maisons de naissance.

Monsieur Gremetz, je veux vous dire que, dans la Somme, nulle part il ne faut faire quatre-vingts kilomètres pour accoucher.

M. Maxime Gremetz. Ah bon ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Il faut, je crois, assurer une sécurité maximale. Bien sûr, il peut arriver qu’il y ait des accouchements extrêmement rapides : c’est toujours arrivé, et cela arrive même si on se trouve à dix minutes d’une maternité. Chez les femmes multipares, en particulier, il peut y avoir des accouchements cataclysmiques qui surviennent en quelques minutes : chaque gynécologue-obstétricien pourra vous raconter ce genre d’anecdotes. Cela fait partie de la vie !

M. le président. La parole est à M. Maxime Gremetz. Soyez bref, s’il vous plaît.

M. Maxime Gremetz. J’ai le droit de prendre la parole !

M. le président. Brièvement, car le règlement ne me permettrait pas, normalement, de vous donner la parole.

M. Maxime Gremetz. La ministre me met en cause, j’ai bien le droit de répondre !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Je ne vous mets pas en cause ; je vous réponds.

M. Maxime Gremetz. Elle ne sait pas le nombre de kilomètres qu’il y a dans la Somme ! Quand je dis quatre-vingts kilomètres, je dis quatre-vingts kilomètres, madame ! Vous ne connaissez pas la carte de la Somme.

À Doullens, vous êtes en train de fermer la dernière maternité de l’est du département, la maternité de l’hôpital public de Doullens. Ne dites pas n’importe quoi, je vous en prie, car cela me met hors de moi, absolument hors de moi ! (Exclamations sur les bancs du groupe UMP.)

M. le président. La parole est à Mme Jacqueline Fraysse.

Mme Jacqueline Fraysse. Je voudrais expliquer mon vote sur l’amendement présenté par Mme la ministre. Évidemment, je ne voterai pas contre, car il apporte des précisions plutôt utiles, ou en tout cas qui vont dans le bon sens. Je m’abstiendrai, car je maintiens que cette disposition pose un certain nombre de problèmes.

En revanche, si la lutte contre les excès sectaires passe effectivement par un encadrement des pratiques, je ne vois pas en quoi la création de ces nouveaux établissements y contribuerait. En cela, je rejoins tout à fait la question posée avec beaucoup de pertinence par M. Garrigue : ces pratiques nouvelles pourraient parfaitement être mises en place dans tous les établissements actuels, publics ou privés d’ailleurs, et nous souhaitons que ce soit fait ; mais en quoi est-il nécessaire de créer des établissements nouveaux, spécifiques, uniquement privés, qui posent d’énormes problèmes, y compris en termes de statut et de protection juridique ?

(L'amendement n° 713 deuxième rectification est adopté.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 344.

La parole est à M. Dominique Tian.

M. Dominique Tian. Cet amendement vise à confier aux directeurs des agences régionales de santé la responsabilité d’arrêter la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Avis défavorable. Il s’agit d’une expérimentation : c’est donc au ministère de la santé qu’il revient de donner les autorisations et non aux ARS. En revanche, celles-ci pourront surveiller les expérimentations sur le terrain.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. C’est moi qui donne l’autorisation, c’est moi qui la retire.

M. Dominique Tian. Je retire l’amendement.

(L'amendement n° 344 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 247.

La parole est à Mme Anny Poursinoff.

Mme Anny Poursinoff. L’amendement du Gouvernement permet l’expérimentation des maisons de naissance dans des conditions correctes.

Nous aurions préféré encore plus de concertation, encore plus d’assurances, que le SAMU soit disponible. Nous voulons en effet que chaque femme puisse accoucher suivant la méthode qui lui semble la meilleure : ces maisons de naissance reçoivent donc tout notre soutien, à condition bien sûr qu’elles soient tout à fait sécurisées, aussi bien pour les mères que pour les enfants.

Nous allons jusqu’à estimer que les femmes qui le désirent, et dont l’accouchement ne présente pas de difficultés prévisibles, doivent pouvoir accoucher à leur domicile, là aussi dans toutes les conditions de sécurité.

Nous souhaitons donc, par cet amendement, une plus grande participation des SAMU, des pompiers, des structures hospitalières. Toutefois, l’amendement du Gouvernement, que nous avons voté, va dans le bon sens.

M. le président. Quel est l'avis de la commission ?

M. Jean-Pierre Door, rapporteur. Cet amendement est satisfait par les précisions apportées par Mme la ministre. Avis défavorable, ou plutôt demande de retrait.

M. le président. Quel est l'avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre de la santé. Même avis.

Mme Anny Poursinoff. Il est retiré.

(L'amendement n° 247 est retiré.)

M. le président. Je suis saisi d'un amendement n° 345 de M. Tian.

M. Dominique Tian. Il est retiré.

(L'amendement n° 345 est retiré.)

(L'article 40, amendé, est adopté.)

Réaction Collectif maisons de naissance, ANFSL, Ciane à l'adoption de l'article par l'Assemblée nationale

Article 40 du PLFSS

Nous nous félicitons du vote de l’article 40 du PLFSS par l’Assemblée Nationale vendredi 29/10, permettant la mise en place d’une expérimentation des Maisons de Naissance attenantes dès septembre 2011, bien qu'il ait été corrigé dans un sens restrictif sur la proximité par rapport à l'exposé des motifs initialement proposé par Mme la Ministre.

Nous espérons désormais que l’article 40 sera voté en séance plénière par les sénateurs.

Les Maisons de Naissance attenantes représentent pour nous une alternative à un suivi de grossesse et un accouchement hospitaliers, au même titre que les Maisons de Naissance extra hospitalières (qui existent dans de nombreux pays : Allemagne, Pays Bas, Belgique, Québec ...) ou que l’accouchement à domicile.

Notre démarche vise à répondre à la demande grandissante des usagers qui souhaitent exercer au mieux leur liberté de choix quant au lieu et mode de prise en charge de la maternité.

Nous rappelons également que les Maisons de Naissance constituent un dispositif qui permet d’assurer pleinement la sécurité des femmes et des nourrissons dans le cadre de grossesses à bas risque grâce :

- à l’accompagnement global à la naissance, qui associe une femme (un couple) et une sage-femme du début de la grossesse à la fin du post partum, permettant une parfaite connaissance de la situation tant médicale que psychologique et sociale et une disponibilité totale lors de l’accouchement ; - au partenariat établi avec une maternité qui permet d’assurer la prise en charge des patientes lorsque le niveau de risque, réévalué tout au long du suivi, le nécessite.

Nous resterons vigilants à ce que ces Maisons de Naissance soient réellement des lieux de physiologie insérés dans un réseau de soins où les sages femmes puissent exercer en toute autonomie selon leurs compétences.

Présentation détaillée des signataires de ce communiqué de presse :

Collectif Maisons de Naissance : Collectif fondé en septembre 2006 regroupant plusieurs associations d’usagers et de professionnels œuvrant pour la mise en place de projets de maisons de naissance en France. Le Collectif Maisons de Naissance rassemble les associations suivantes : Bien Naître (Nantes), CALM (Comme A La Maison, Paris 12e), Cœur de Famille (Pau), La Cause Des Parents (Lyon), Maisounaiton (Rennes), PaMaNa (Pontoise). Sabrina Ben Brahim, présidente du CALM, porte-parole du Collectif Maisons de Naissance.

CIANE (Collectif Interassociatif Autour de la NaissancE) : Le CIANE est un collectif d'associations fondé en 2003 agréé pour la représentation des usagers dans le système de santé. Il ne relève d’aucune appartenance politique ou syndicale, ni d’une obédience religieuse ou philosophique. Ses principes reposent sur la transparence, et son engagement est de nature citoyenne, respectueuse des lois. Il fait partie des associations agréées au niveau national pour la représentation des usagers de la santé (agrément N° N2008AG0020) et, à ce titre, participe à la commission nationale de la naissance et aux travaux d’organismes de santé (HAS, ...) http://ciane.net

Chantal Ducroux-Schouwey, présidente du CIANE.

ANSFL (Association Nationale des Sages-Femmes Libérales) : L’Association Nationale des Sages-Femmes Libérales est une association régie par la loi de 1901. Créée en 1983, elle a pour but la revalorisation et la défense de la profession de sage- femme libérale en France. Elle est reconnue et identifiée par toutes les instances décisionnelles et professionnelles comme représentant les sages-femmes libérales et participe aux discussions avec les ministères et aux travaux de la Haute Autorité en Santé (HAS). Laurence Platel, présidente de l’ANSFL.

Article rejeté par le Sénat, 13 novembre 2010

Le rapport de la commission des affaires sociales du Sénat (suppression)

Compte rendu (provisoire) des débats au Sénat

(copie faite le 15 novembre 2010)

Article 40 Au code de la santé publique, il est rétabli un article L. 6122-19 ainsi rédigé :

« Art. L. 6122-19. – À partir du 1er septembre 2011 et pendant une période de deux ans, le Gouvernement est autorisé à engager l’expérimentation de nouveaux modes de prise en charge de soins aux femmes enceintes et aux nouveau-nés au sein de structures dénommées : “maisons de naissance”, où des sages-femmes réalisent l’accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse, dans les conditions prévues aux articles L. 4151-1 et L. 4151-3. Ces expérimentations ont une durée maximale de cinq ans.

« À cet effet, il est dérogé aux articles L. 1434-2, L. 1434-7 et L. 6122-1.

« Les maisons de naissance ne sont pas des établissements de santé au sens de l’article L. 6111-1 et ne sont pas soumises au chapitre II du titre II du livre III de la deuxième partie.

« Le décret en Conseil d’État visé au dernier alinéa du présent article précise notamment que la maison de naissance doit être attenante à une structure autorisée à l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle doit obligatoirement passer une convention.

« L’activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de la structure autorisée à l’activité de gynécologie-obstétrique autorisée attenante.

« Il peut être dérogé aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux modalités d’application de la prise en charge de certains actes inscrits sur la liste prévue à l’article L. 162-1-7 de ce même code.

« Par dérogation à l’article L. 162-22-13 du même code, les dépenses nécessaires au fonctionnement des maisons de naissance peuvent être prises en charge en tout ou partie par la dotation annuelle prévue à l’article L. 162-22-14 du même code.

« Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental en fonction notamment de l’intérêt et de la qualité du projet pour l’expérimentation et de son intégration dans l’offre de soins régionale en obstétrique. La suspension de fonctionnement d’une maison de naissance inscrite sur la liste peut être prononcée par le directeur général de l’agence régionale de santé pour les motifs et dans les conditions prévues par l’article L. 6122-13. Le retrait d’inscription à la liste est prononcé par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en cas de manquement grave et immédiat à la sécurité ou lorsqu’il n’a pas été remédié aux manquements ayant motivé la suspension.

« Un premier bilan de l’expérimentation est établi au 31 décembre 2014 par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en vue de la poursuite ou de l’abandon de l’expérimentation. Le Gouvernement adresse au Parlement un bilan définitif de l’expérimentation dans l’année qui suivra sa fin.

« Les conditions de l’expérimentation et notamment les conditions d’établissement de la liste susmentionnée, les conditions de prise en charge par l’assurance maladie de la rémunération des professionnels, les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons de naissance ainsi que les modalités d’évaluation de l’expérimentation à son terme sont fixées par décret en Conseil d’État. »

M. le président. La parole est à Mme Claire-Lise Campion, sur l'article.

Mme Claire-Lise Campion. Cet article vise à expérimenter, au sein de maisons de naissance, moins médicalisées que les maternités, le suivi par des sages-femmes des grossesses et des naissances. Cette proposition d’expérimentation a fait l’objet d’un long débat à l’Assemblée nationale, la commission des affaires sociales allant même jusqu’à voter un amendement de suppression. Nous demeurons, pour notre part, très réticents à l’égard de cet article, qui a, je le reconnais bien volontiers, fortement évolué au cours des débats. Je peux tout à fait comprendre qu’il convient de ne pas surmédicaliser l’accouchement. Je suis très attentive aux reproches des femmes qui estiment que l’accouchement ne prend pas assez en compte la dimension humaine. Cela tient souvent à deux raisons.

Tout d’abord, il arrive que le personnel médical soit soumis à des protocoles qui favorisent des actes médicaux parfois inutiles. Ce sont les médecins eux-mêmes qui nous le disent !

Ensuite, le personnel médical, parfois malmené par le manque de moyens, ne peut pas toujours prendre le temps suffisant pour accompagner les couples. Néanmoins, il ne faut évidemment pas oublier les risques susceptibles de survenir à l’occasion d’un accouchement et dont l’issue peut être dramatique. En d’autres termes, il ne faudrait pas que le travail mis en place depuis des années, à travers les plans de périnatalité, pour améliorer la sécurité de la mère et de l’enfant soit mis à mal à l’occasion d’une décision prise avec une trop grande précipitation.

Certes, en exigeant que ces maisons de naissance soient attenantes à une structure autorisée à l’activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle doit obligatoirement passer une convention, un début de réponse a été apporté aux inquiétudes exprimées. Cependant, des questions demeurent. Je n’en citerai qu’une, mais elle est essentielle. Qui assumera l’investissement lié la création de ces structures ? Nous ne le savons pas !

Enfin, mes chers collègues, l’attitude du Gouvernement est tout de même assez paradoxale ! D’un côté, il ferme des maternités de proximité au prétexte qu’elles étaient dangereuses et, de l’autre, il nous propose aujourd’hui la mise en place de maisons de naissance qui n’apportent pas, à ce jour, toutes les garanties que nous sommes en droit d’attendre.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, sur l’article.

M. Alain Milon. L’absence de garanties de nature à préserver un haut niveau de sécurité des soins prodigués aux parturientes et aux nourrissons s’oppose à la mise en place de cette expérimentation.

L’objectif des pouvoirs publics, via les plans périnatalité successifs, a été d’accroître la sécurité de la mère et de l’enfant lors de la naissance par le recours à des normes précises de fonctionnement et par une restructuration importante de l’offre obstétrico-pédiatrique. L’un des axes du plan de périnatalité de 1970-1976 consistait en la sécurisation de la naissance avec trois principales mesures : le renforcement des moyens techniques adéquats dans les maternités, notamment pour réanimer les nouveau-nés, la formation des professionnels et, surtout, la disponibilité immédiate de ces derniers. Le plan 1995-2000 a privilégié la sécurisation de l’accouchement par la restructuration des maternités et, concrètement, la fermeture des plus petites d’entre elles, celles qui pratiquaient moins de 300 accouchements, sous l’effet de normes renforcées.

S’il est nécessaire d’éviter une surmédicalisation de la naissance et de répondre au problème de la démographie médicale en obstétrique, les résultats médiocres de la France en termes de morbidité et de mortalité maternelle et fœtale doivent nous interdire de baisser notre niveau d’exigence en matière de sécurité des soins.

L’expérimentation de maisons de naissance ne permet pas de répondre à ces objectifs. La littérature médicale récente montre en effet que la pertinence de la définition de la grossesse à bas risque est très difficile à établir et que tout accouchement peut exiger une prise en charge pluridisciplinaire en urgence, ce que ne permettraient pas les maisons de naissance.

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, sur l’article.

M. Gilbert Barbier. Cette volonté d’expérimentation des maisons de naissance semble, dans l’état actuel de notre système hospitalier, public et privé, pour le moins inopportune, hâtive et agressive vis-à-vis des unités de gynécologie-obstétrique de nos établissements, et ce à plusieurs titres. M. Guy Fischer. Très bien !

M. Gilbert Barbier. Pour moi, le point essentiel est celui de la sécurisation des accouchements, qui est au cœur de la spécialité obstétricale. C’est si vrai que le projet actuel vise à un adossement d’un tel établissement à un service de gynécologie-obstétrique, qui devra intervenir en cas de complications survenues avant ou pendant l’accouchement.

Il importe de définir la notion de grossesse et d’accouchement à bas risque, comme l’a souligné Alain Milon, puisque c’est elle qui sera à l’origine d’une orientation de la femme vers un service classique ou vers une maison de naissance.

Il s’agit donc de mesurer les dangers qu’il y a à laisser accoucher dans un lieu distinct d’une salle d’accouchement classique une grossesse classée jusqu’au début du travail comme à bas risque mais qui peut se terminer par un accouchement à haut risque.

Parmi les expériences menées sur des effectifs significatifs, je retiendrai celle de Howett, sur la Cochrane Database. Elle fait apparaître un taux relativement élevé de transfert de la maison de naissance vers la salle d’accouchement classique soit avant, soit durant le travail. Ce taux se situe entre 29 % et 87 %.

Les principales raisons de transfert per partum retenues étaient l’absence de progression du travail, la suspicion de détresse fœtale ou la demande d’analgésique pharmacologique.

Toujours d’après cette étude, on observe une mortalité périnatale significativement plus importante dans les maisons de naissance, tout spécialement là où le personnel était différent de celui des salles d’accouchement classique.

Si j’ai bien compris la proposition qui est faite, les services de gynécologie-obstétrique auxquels seront adossées ces maisons devront assurer une permanence de soins par du personnel médical et paramédical, un personnel dont l’activité sera forcément moindre, car je ne pense pas que les accouchements en maison de naissance viendront en plus des activités du service. Cette diminution d’activité ne sera pas sans conséquence dans le cadre de la T2A, actuellement appliquée à l’obstétrique.

Par ailleurs, sous quel contrôle les activités de ces maisons de naissance seront-elles placées ? Le chef du service de gynécologie obstétrique aura-t-il droit de cité et comment ? Tout cela n’est pas clair !

Enfin, comment ces établissements fonctionneront-ils sur les plans financier et technique ? Seront-ils soumis à la T2A ? Y aura-t-il un prix de journée comprenant les rémunérations des sages-femmes ?

Je pense très sérieusement qu’après avoir fermé plusieurs petites maternités rurales sous le prétexte de sécurité, il est bien difficile d’expliquer cette nouvelle orientation, sinon par la pression de certains lobbies de tous bords !

M. Guy Fischer. Et voilà !

M. Gilbert Barbier. Avant de se lancer dans une telle expérimentation, il serait sage, madame le ministre, de procéder à une étude objective des avantages et inconvénients de ces maisons de naissance dans notre pays, dont le système ne peut être comparé aux autres, notamment à celui des États-Unis. Peut-être faut-il tout simplement repenser le service aujourd'hui offert à la population dans nos actuels lieux de naissance.

M. le président. Je suis saisi de cinq amendements identiques. L'amendement n° 121 est présenté par M. Lardeux, au nom de la commission des affaires sociales.

L'amendement n° 252 est présenté par M. Fischer, Mmes David et Pasquet, M. Autain, Mme Hoarau et les membres du groupe Communiste, Républicain, Citoyen et des Sénateurs du Parti de Gauche.

L'amendement n° 316 rectifié est présenté par MM. Barbier, Collin et les membres du groupe du Rassemblement Démocratique et Social Européen.

L'amendement n° 355 est présenté par M. Le Menn, Mme Jarraud-Vergnolle, M. Daudigny, Mme Le Texier, MM. Teulade et Cazeau, Mmes Demontès, Campion, Alquier et Printz, MM. Kerdraon, Godefroy, Jeannerot, S. Larcher et Gillot, Mmes Ghali, San Vicente-Baudrin et les membres du groupe Socialiste et apparentés.

L'amendement n° 495 rectifié est présenté par MM. Milon, P. Blanc, Laménie, J. Blanc et Revet.

Ces cinq amendements sont ainsi libellés :

Supprimer cet article.

La parole est à M. André Lardeux, rapporteur, pour présenter l’amendement n° 121.

M. André Lardeux, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. Cet amendement de suppression de l’article 40 est la synthèse des avis entendus par la commission des affaires sociales. Malgré l’importance du sujet, qui vient d’être largement évoqué, je vais tenter de ne pas tomber dans le travers des orateurs qui donnent en longueur ce qui leur manque en profondeur ! (M. Alain Milon applaudit. – Exclamations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) )

Mme Catherine Procaccia. M. Lardeux n’a visé personne en particulier ! (Sourires sur les travées de l’UMP.)

M. André Lardeux, rapporteur de la commission des affaires sociales pour la famille. La formule n’est pas de moi ! Mais Montesquieu connaissait la nature humaine... (Sourires.)

M. Guy Fischer. Et voilà, vous nous attaquez tout de suite ! (Nouveaux sourires.)

M. André Lardeux, rapporteur. Pourquoi vous sentez-vous visé, monsieur Fischer ?

La commission pense qu’il serait judicieux de ne pas maintenir cet article pour plusieurs raisons.

D’abord, l’information de la représentation nationale est, pour l’instant, nettement insuffisante.

Ensuite, nos performances dans le domaine de la périnatalité devraient nous inciter à la prudence.

Enfin, cela a été dit, je tiens à la cohérence de nos positions. On nous explique, depuis de très nombreuses années, qu’il faut absolument fermer les petites maternités en raison de leur manque de sécurité, ce que je peux parfaitement comprendre, même si ce n’est pas sans poser des difficultés aux populations les plus éloignées des centres urbains.

Si, comme le texte l’indique, ces équipements doivent se trouver quasiment à l’intérieur des maternités, pourquoi ne pas demander aux responsables de ces maternités de proposer une nouvelle organisation de leur service, répondant aux préoccupations des femmes qui souhaitent accoucher dans des conditions un peu moins médicalisées, dès lors, bien sûr, que leur état de santé le leur permet ?

La toute dernière raison est plus personnelle. Avant que cet article 40 ne soit débattu en commission, on ne nous en a pas beaucoup parlé. Ensuite, bien entendu, il y a eu du lobbying direct et indirect : c’est la règle du jeu et ce n’est pas très grave. Mais je voudrais être certain que, derrière ce lobbying, ne s’avancent pas masqués certains groupes dont les objectifs ne sont pas clairement affichés. D’où parlent leurs représentants ? Je n’ai pas encore pu le déterminer !

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour présenter l'amendement n° 252.

M. Guy Fischer. À l’instar de la commission des affaires sociales, les sénatrices et sénateurs du groupe CRC-SPG proposent la suppression de cet article 40, qui a pour objet d’autoriser l’expérimentation des maisons de naissance.

Avant d’en venir au fond, je voudrais vous dire notre surprise de voir un tel article apparaître dans un projet de loi de financement de la sécurité sociale.

Cette disposition, si elle devait être adoptée, ne manquerait pas d’être censurée par le Conseil constitutionnel au motif que cette expérimentation n’a pas de lien direct avec la sécurité sociale. C’est en tout cas ce que l’on voudrait croire, comme pour se rassurer… Car si un tel lien existait, ce serait l’aveu bien involontaire du Gouvernement qu’il s’agit là d’une mesure destinée à concurrencer le secteur hospitalier, dans le seul but de faire des économies, potentiellement, sur la santé des femmes et de leurs enfants. Par ailleurs, bien que cette expérimentation ait été prévue dans le plan périnatalité 2005-2007, il semble que sa transposition dans le présent projet de loi n’ait pas fait l’objet d’une concertation, y compris avec ceux qui défendent cette proposition. Je pense particulièrement à l’association CALM, Comme à la maison, laquelle – d’après l’une de ses représentantes qui a contacté notre groupe – n’aurait pas même été informée du dépôt de cet article 40. Reconnaissez qu’il s’agit d’une conception assez particulière de la concertation !

Toutefois, si nous sommes opposés à cet article, c’est que nous redoutons les conséquences qu’aurait son adoption. Nous comprenons que des femmes puissent vouloir bénéficier d’un accouchement moins médicalisé, moins technicisé que ceux qui sont réalisés au sein des plateaux techniques propres aux établissements de santé, mais nous ne pouvons souscrire à la proposition d’expérimentation telle qu’elle est proposée ici, considérant qu’elle est en incohérence complète avec la politique hospitalière que mène le Gouvernement en matière de politique, plus particulièrement en ce qui concerne les maternités.

En effet, vous n’hésitez pas à fermer des maternités publiques sous prétexte que, réalisant un nombre d’actes insuffisants, elles présenteraient des risques pour les femmes comme pour les enfants.

Or, par cet article 40, vous nous proposez d’ouvrir des structures totalement dérogatoires, non soumises aux mêmes obligations que les établissements publics de santé. Je pense, par exemple, aux tarifs opposables ou encore au fait que de telles structures puissent se soustraire aux règles définies dans les schémas régionaux d’organisation des soins, qui doivent pourtant garantir à nos concitoyens un véritable accès aux soins, correspondant – c’est important de le souligner – à leurs besoins en santé.

C’est à croire que vous savez déjà que ces structures ne parviendront pas à trouver un public suffisamment large !

Il y a une autre source d’inquiétude pour notre groupe. C’est sans doute la question la plus importante, et nous la développerons si nécessaire : je veux parler de la sécurité.

L’adossement à un établissement de santé, tel qu’il a été adopté à l’Assemblée nationale, atteste, s’il en était besoin, qu’il peut y avoir des risques.

Mme Annie David. Bien sûr !

M. Guy Fischer. C’est la raison pour laquelle il faudrait pouvoir disposer rapidement d’un plateau technique. Or, même si les risques sont inhérents à la pratique médicale, nous considérons qu’il n’y a pas lieu de les multiplier.

Madame la ministre, mes chers collègues, fortement opposés à ces maisons de naissance, nous proposons donc la suppression de l’article 40.

M. François Autain. Très bien !

M. le président. La parole est à M. Gilbert Barbier, pour présenter l’amendement n° 316 rectifié.

M. Gilbert Barbier. Il est défendu.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il faudrait tout de même connaître le point de vue des femmes dans ce débat : on n’entend que des hommes ! Mme Christiane Demontès. Ne vous inquiétez pas, des femmes, vous allez en entendre !

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Mme Campion est intervenue sur l’article !

M. Guy Fischer. Qu’est-ce que c’est que ce féminisme, madame la ministre ? (Sourires.)

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est tout de même nous qui accouchons !

M. le président. La parole est à Mme Raymonde Le Texier, pour présenter l’amendement n° 355.

Mme Raymonde Le Texier. Vous voyez, madame la ministre, votre vœu est exaucé : vous allez entendre une femme, et une femme qui s’est battue bec et ongles, voilà cinquante ans, à l’occasion de ses premiers accouchements, en faveur de l’accouchement sans douleur.

Si notre amendement vise à écarter l’expérimentation des maisons de naissance telle que vous la proposez, c’est-à-dire sans présenter toutes les garanties en matière de sécurité, je tiens à être claire d’emblée : les socialistes ne sont pas opposés au principe des maisons de naissance.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ah, tout de même !

Mme Raymonde Le Texier. Toutefois, en l’état de la demande des règles de sécurité médicales, envisagées ou non, et des priorités de la ventilation budgétaire, nous estimons que cette expérimentation n’est ni opportune ni urgente.

À celles, voire à ceux qui militent ardemment, comme c’est leur droit, pour les maisons de naissance, où l’on accoucherait plus « naturellement », de façon moins « médicalisée », je voudrais dire que, si la mortalité infantile a été divisée par trois au cours des trente dernières années, c’est précisément parce que le suivi de la grossesse, le déroulement de l’accouchement et le suivi post-natal ont été médicalisés.

Nous n’entendons donc pas faire marche arrière, en particulier aujourd'hui, alors que le taux de mortalité au cours des premières semaines de la vie est reparti légèrement à la hausse depuis 2006. En 2009, on a enregistré 3,7 décès de nourrissons pour mille naissances. S’agissant du taux de mortalité infantile, la France est passée du cinquième au quatorzième rang mondial. Les promoteurs du projet prétendent que les maisons de naissance ne concerneraient que les femmes présentant des grossesses « sans situation de risque ». Permettez-moi d’être dubitative. Chacun le sait, si certaines grossesses semblent effectivement moins à risque que d’autres, les critères de risque de la grossesse ne présagent en rien l’absence de complications graves pouvant apparaître pendant l’accouchement. Les grossesses « sans situation de risque » sont tout autant susceptibles de se terminer par un accouchement avec une hémorragie de la délivrance, une rétention de tête ou encore des circulaires du cordon. Ce sont autant de complications qui, en l’absence de personnels et équipements médicaux adéquats, peuvent se révéler extrêmement dangereuses, voire létales.

Les risques sont encore accrus par l’augmentation continue des primipares âgées : accouchement difficile, prématurité…

En outre, se pose la question du financement de ces maisons, de leur statut, de leur organisation, de leurs conditions d’implantation. Tout cela est vraiment trop flou !

À l’inverse, il y a une certitude : au vu de l’état catastrophique de nos finances publiques et des coupes budgétaires qui se multiplient, PLFSS après PLFSS, comment ne pas craindre que vous n’utilisiez, à terme, les maisons de naissance, logiquement moins coûteuses puisque disposant de moins de personnels et de moins d’équipements, pour justifier la fermeture de quelques maternités supplémentaires ?

Cela a déjà été dit, des maternités ont d'ores et déjà été fermées précisément parce qu’elles ne présentaient pas toutes les garanties en matière de sécurité.

Sur le fond, nous considérons que la priorité ne saurait être donnée à ces nouvelles structures.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ce n’est pas une priorité ! Mme Raymonde Le Texier. D’ailleurs, qui, ici, peut penser qu’il vaut mieux investir dans les maisons de naissance plutôt que dans la création de nouvelles places en services de néonatalité ?

Entre, d’une part, l’amélioration des moyens consacrés à la prise en charge des naissances dans les maternités publiques, en particulier dans les situations les plus difficiles, ainsi qu’à un accompagnement de qualité afin d’humaniser au maximum ce moment essentiel de la vie, et, d’autre part, la demande de quelques milliers de femmes ne souhaitant accoucher ni chez elles ni à l’hôpital, nous choisissons évidemment la première option.

C’est ce qui justifie notre amendement de suppression de l’article 40. M. le président. La parole est à M. Marc Laménie, pour présenter l’amendement n° 495 rectifié.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Encore un homme !

M. Marc Laménie. J’irai dans le sens de l’intervention de mon collègue Alain Milon, premier des cosignataires de cet amendement.

Sans revenir sur les arguments qui ont été présentés, je me contenterai de souligner que l’expérimentation des maisons de naissance ne permet pas, à notre sens, de répondre aux différents objectifs fixés.

M. le président. La parole est à M. le rapporteur général.

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales.

Mes chers collègues, la commission m’a évidemment chargé d’émettre un avis favorable sur ces amendements puisque l’un d’entre eux est présenté par la commission elle-même. Mais attendons l’intervention de Mme la ministre : peut-être sera-t-elle suffisamment convaincante pour inciter les auteurs des amendements à les retirer ou pour amener une majorité d’entre vous à s’y opposer.

Mme Raymonde Le Texier. C’est insupportable d’entendre de tels propos !

M. Alain Vasselle, rapporteur général de la commission des affaires sociales. Si, d’aventure, pareille situation se produisait, je précise qu’il y a des amendements de repli permettant de sécuriser les maisons de naissance. (Protestations sur les travées du groupe CRC-SPG et du groupe socialiste.)

M. Guy Fischer. Trahison de la position de la commission !

Mme Raymonde Le Texier. Absolument !

M. le président. Quel est l’avis du Gouvernement ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Mesdames, messieurs les sénateurs, la multiplicité des interventions montre que ce sujet vous intéresse, et j’en suis fort heureuse.

Je ferai un certain nombre d’observations.

Premièrement, je n’admets pas que l’on puisse balayer d’un revers de main la volonté de certaines femmes d’avoir un accouchement moins médicalisé, moins technicisé, et, qui plus est, de le faire en évoquant les lobbies ou les sectes.

M. Guy Fischer. Ce n’est pas nous !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je ne dis pas que vous l’avez fait, vous, mais cela a été dit !

Je considère que ridiculiser certaines femmes et les renvoyer en touche en leur disant : « Mes petites chéries, vous êtes manipulées par des lobbies », c’est quand même un peu osé !

Dans notre pays, 1 % des naissances ont lieu à domicile. C’est un phénomène qui connaît d’ailleurs une progression continue, avec un quasi-doublement en quelques années.

En outre, 3 % à 5 % des femmes interrogées souhaiteraient un accouchement plus « naturel », moins médicalisé.

Il importe, par conséquent, de prendre en considération et de respecter une telle volonté. Cessons de ridiculiser ces femmes en les présentant comme des mineures qui seraient manœuvrées par des gourous. Mais, même en admettant que cela soit vrai, force est de reconnaître que l’absence, dans notre système de santé, d’offres moins médicalisées et technicisées, a ouvert un boulevard à certaines sectes : chaque fois que le système ne répond pas à la demande, s’y engouffrent les lobbies qu’à juste titre d’aucuns condamnent.

Il est donc tout à fait intéressant de pouvoir répondre à la volonté de ces femmes – très minoritaires, j’en conviens – et de prévoir un dispositif présentant toutes les garanties possibles. Vous avez certainement eu connaissance de professionnels n’apportant pas les garanties suffisantes – ils s’autoproclamaient « sages-femmes » sans l’être vraiment – ou de sectes qui, précisément, s’engouffraient dans la brèche.

Deuxièmement, nous ne nous sommes pas avancés sur la voie de l’expérimentation au hasard. Voilà à peu près quinze ans que nous y réfléchissons ! D’ailleurs, une telle expérimentation était proposée dans le plan périnatalité 2005-2007. De grâce, ne prétendez pas que cette idée a surgi quasiment du néant, après un quart d’heure de réflexion : toutes les instances et les autorités de notre pays œuvrant dans le domaine de la néonatalogie ont été consultées.

Nous avons, de plus, étudié les démarches et les procédures suivies à l’étranger, qui sont riches d’enseignements. Tout près de chez nous, aux Pays-Bas, 30 % des naissances ont lieu de cette façon et les indicateurs de mortalité et de sécurité périnatales y sont exactement les mêmes que dans les autres pays les plus avancés. Dans de nombreux pays nordiques, où l’éloignement des maternités et le taux de naissance à domicile sont évidemment beaucoup plus importants, les indicateurs affichent même des performances supérieures aux nôtres.

Pour en revenir à l’exemple des Pays-Bas, je signale que les maisons de naissance, sans être attenantes aux maternités, n’y sont pas distantes de plus de vingt minutes. Elles se révèlent au moins aussi performantes que nos propres structures.

Troisièmement, il y aurait, à vous entendre, une certaine incohérence à promouvoir tout autant un haut niveau d’exigence dans les maternités, publiques comme privées, avec un personnel en nombre suffisant et tout le matériel nécessaire, et l’expérimentation des maisons de naissance. Mais c’est tout le contraire !

L’accouchement est évidemment un acte naturel et, dans l’immense majorité des cas, fort heureusement, tout se passe bien. Sans doute comme un certain nombre d’entre vous, je suis née au domicile de mes parents, et je crois savoir que cela s’est bien passé.

M. Nicolas About. Il n'y a pas de traces ! (Sourires.) Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Visibles, du moins… (Nouveaux sourires.)

Ce fut aussi le cas pour mon frère et ma sœur.

Mme Annie David. C’était une autre époque !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est parce que peut survenir une difficulté qu’un plateau technique de haut niveau est nécessaire, même s’il ne sert que dans 1 %, 2 %, voire 3 % des cas. Le niveau d’exigence est très élevé, car il faut pouvoir répondre à des situations qui, pour être extrêmement rares, n’en existent pas moins. Mais en quoi cela serait-il incohérent avec la volonté de développer une expérimentation sur les maisons de naissance ?

En aucun cas une telle expérimentation ne se fera au détriment des maternités ! Notre pays ne souffre d’aucun problème d’offre pour ce type de structures : le nombre de places est suffisant, notamment en néonatalogie ; les capacités d’accueil sont largement au niveau, et elles sont même excédentaires. Il ne faut pas dire n’importe quoi ! La question du choix entre un système et un autre ne se pose pas.

Par ailleurs, il n’y aura aucun fléchage vers ces maisons de naissance. À qui s’adressent-elles ? À des personnes qui en font la demande, souhaitant une prise en charge moins médicalisée. Si une primipare âgée demande à accoucher dans une maison de naissance, on ne va évidemment pas lui dire oui. Voilà l’exemple typique d’une femme présentant des facteurs de risque maximum : elle sera très attentivement suivie et naturellement orientée, pour son accouchement, vers un plateau technique de première qualité.

Le fait qu’il s’agisse d’une expérimentation va justement permettre de dire à ces femmes un certain nombre de choses que l’on ne leur aurait peut-être pas dites si l’on avait laissé se développer des offres alternatives à ces maisons de naissance. C’est la meilleure façon d’assurer la sécurité ! Bien entendu, je suis tout à fait d’accord pour considérer qu’un certain nombre de difficultés surgissent au moment de l’accouchement, et qu’un accouchement se révèle difficile au moment même où il a lieu. C’est la raison pour laquelle nous n’avons pas voulu suivre strictement l’exemple des Pays-Bas, où une maison de naissance peut se trouver à vingt minutes d’une maternité. Nous n’avons même pas voulu suivre l’exemple d’autres pays où la maison de naissance doit simplement se trouver dans l’enceinte de l’hôpital. En effet, la superficie couverte par un hôpital – pour certains hôpitaux parisiens, elle peut atteindre 10 ou 15 hectares – est telle que, avec cette seule exigence, la maison de naissance pourrait se trouver passablement éloignée de la maternité. C’est pourquoi nous prévoyons que la maison de naissance doit être attenante à la maternité,…

M. Bernard Cazeau. Alors, où est l’intérêt d’en créer une ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … ce qui permettra de garantir aux femmes et aux nouveau-nés l’accès à des soins de qualité. Du reste, dans notre pays, 2 000 naissances ont déjà lieu dans des maisons de naissance de ce type, qui sont comme des annexes des maternités. Alors, arrêtez de vous faire peur !

Nous préconisons une expérimentation, assortie des garanties préconisées par le Conseil national de la naissance. D’ailleurs, conformément à l’engagement que j’ai pris au cours de la discussion générale, l’avis du Gouvernement sera favorable aux amendements qu’a évoqués le rapporteur général, afin que la Haute Autorité de santé donne son avis sur le cahier des charges et que vous puissiez disposer d’un bilan avant la fin de l’expérimentation.

Sincèrement, notre démarche est une démarche de sécurité. Elle vise simplement à répondre à la volonté d’un certain nombre de femmes, car il existe une dynamique de la demande à cet égard. Si nous ne répondons pas à cette volonté par une offre de soins, croyez bien que nous laisserons ces femmes se confronter à des risques potentiels bien plus importants. Je vous propose donc précisément d’encadrer les naissances moins médicalisées afin d’assurer la qualité des soins.

Cette façon d’accoucher ne sera probablement jamais majoritaire, je le reconnais bien volontiers. Mais il ne faut pas ridiculiser ces femmes : elles ne vous le pardonneront pas !

M. François Autain. Des menaces ?

M. le président. La parole est à Mme Marie-Thérèse Hermange, pour explication de vote.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Je sais que certaines expériences intéressantes sont menées à l’étranger. Je sais également que, depuis quelque temps, les différents plans de périnatalité permettent de réfléchir à ces expérimentations, qui sont aussi conduites, bien souvent, par des gynécologues-obstétriciens responsables de maternités de niveau 3.

Je m’interroge malgré tout. Puisqu’il s’agit d’offrir à ces femmes qui désirent accoucher à domicile un cadre moins médicalisé, pourquoi ne maintient-on pas certains lits de maternité de niveau 1 ? (Très bien ! sur les travées du groupe socialiste.) Il serait possible de les adosser à des maternités de niveau 3.

À l’AP-HP et dans les grands CHU, des lits de maternité de niveau 1 ont été supprimés pour faire quasi exclusivement des maternités de niveau 3. Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Par définition, une maternité est médicalisée.

Mme Marie-Thérèse Hermange. Il en résulte qu’un certain nombre de femmes, aujourd’hui, ne peuvent plus accoucher à l’hôpital public parce que les grands CHU sont spécialisés en maternités de niveau 3.

Par ailleurs, je ne dispose pas des chiffres relatifs à la mortalité maternelle, mais il me semble que le problème, actuellement, tient moins à est la mortalité périnatale qu’à la mortalité maternelle. Si celle-ci demeure faible chez nous, elle se maintient néanmoins à un niveau tel que l’on est conduit à se préoccuper de la prévention de certaines pathologies comme l’hémorragie de la délivrance.

Enfin, je me suis récemment intéressée à un chiffre donné par l’INSEE sur l’augmentation de la mortalité infantile. Bien que cette augmentation n’ait pas de lien direct avec le taux de mortalité périnatale, n’est-il pas possible de voir, à travers les indications que vous nous donnez, une conjonction entre l’augmentation de la mortalité infantile et l’augmentation du nombre de naissances à domicile ? (Mme Françoise Henneron applaudit.)

M. François Autain. Vous avez raison !

M. Guy Fischer. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme Muguette Dini, pour explication de vote. Mme Muguette Dini. Mes chers collègues, je précise bien que c’est en mon nom propre, et non pas en tant que présidente de la commission des affaires sociales, que je m’exprime en cet instant. Au reste, en commission, je n’ai pas voté pour la suppression de l’article 40.

En effet, il me semble que la création de ces maisons de naissance correspond à une réelle demande.

Même si ces établissements ne sont pas des établissements de santé, comme le précise le texte, la sécurité y sera néanmoins garantie puisque ces maisons seront attenantes à des services de gynécologie-obstétrique. Il s’agit de surcroît d’une expérimentation dont le bilan doit être fait avant le 31 décembre 2014. Combien de maisons de naissance auront été créées d’ici là ? Combien de naissances auront eu lieu dans ces établissements ? Nous n’ouvrirons pas 150 maisons de naissance ! Nous allons simplement en ouvrir quelques-unes,…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Cinq !

Mme Muguette Dini. … pour voir comment le système fonctionne. Si nous ne sommes pas satisfaits, ou bien nous améliorerons les maisons ou bien nous les fermerons.

Bien entendu, lorsqu’on choisit d’aller dans une maison de naissance, il s’agit d’une décision tout à fait personnelle, mais j’imagine que, s’il y a le moindre risque, une femme ne sera pas autorisée à accoucher dans une maison de naissance.

Je ne comprends donc pas bien pourquoi nous ne pourrions pas procéder une telle expérimentation.

Madame la ministre, si j’ai un reproche à vous faire, c’est peut-être d’avoir placé cette disposition dans le PLFSS, laissant ainsi penser qu’il y avait un aspect financier. Peut-être aurait-il été plus approprié d’introduire ces dispositions dans un texte traitant strictement de questions de santé. Cela étant dit, je ne voterai pas les amendements tendant à la suppression de cet article.

M. le président. La parole est à M. Nicolas About, pour explication de vote. M. Nicolas About. Je partage les remarques de Mme Dini et je pense que ce dispositif est attendu depuis longtemps.

Mme Patricia Schillinger. Mais qui le demande ?

M. Nicolas About. Comme interne des hôpitaux, je me suis longtemps trouvé au contact de femmes qui accouchaient. J’ai appris ce qu’était un accouchement grâce aux sages-femmes. Je connais leur sérieux et je sais que c’est souvent sur elles seules que repose le bon déroulement d’un accouchement ou la réanimation d’un nouveau-né. Je tiens à dire, après la remarque de Marie-Thérèse Hermange, que la classification des maternités repose souvent sur leur capacité à réanimer des nouveau-nés.

Bien entendu, lorsque le risque materno-foetal existe, une femme est plutôt envoyée dans une maternité de niveau 3 afin que soit garantie sa sécurité, de même que celle du nouveau-né.

Durant toutes ces années passées en clinique, dans des services de chirurgie et de maternité, j’ai pu observer que, très souvent, la présence de cette personne compétente qu’est la sage-femme était essentielle. En effet, la plupart des médecins accoucheurs arrivaient pour signer la feuille de maladie alors que l’enfant était réanimé et en bonne santé. Lorsqu’une intervention chirurgicale ou une anesthésie étaient nécessaires, s’écoulait un temps certainement supérieur à celui que prendra le transfert vers le service approprié d’une femme se trouvant dans une structure attenante à un plateau technique de haut niveau.

Je crois que, dans ces conditions, il y aura plus de sécurité dans les maisons de naissance que dans un certain nombre de cliniques, à en juger par ce que j’ai vu durant toute ma carrière. Je considère que cette innovation va dans le sens de l’intérêt des femmes et des enfants.

Je suis, comme Mme la ministre, né à la maison. Dans mon cas, il y a peut-être des traces ! (Sourires.) Lorsqu’on n’est pas en présence d’une naissance à risque – ni pour la mère ni pour l’enfant –, compte tenu de la compétence des sages-femmes et de la proximité de la structure hospitalière, il n’y a pas plus de risque à accoucher dans ce type de structure.

L’expérimentation suppose une limite dans le temps. Il y aura lieu de faire un bilan à l’issue de la période d’expérimentation. Il est de plus possible de mettre fin à l’expérimentation à tout moment si cela se révèle nécessaire. Tout cela est prévu dans le texte.

Enfin, les chiffres présentés par les uns ou les autres reposent sur des études étrangères qui portaient non sur des structures attenantes, mais sur des structures situées parfois à plusieurs kilomètres de la structure hospitalière. Ces chiffres ne m’ont pas permis de revenir sur ma position ni sur mon souhait de voir ces structures se créer. En effet, ils ne sont pas applicables au projet qui nous est soumis, qui élimine les risques découlant des expériences menées à l’étranger.

Cette proposition se rapproche de l’expérience des Pays-Bas. Je souhaite qu’une telle offre existe aussi en France, sachant qu’un certain nombre de femmes, aujourd’hui, refusent purement et simplement de se rendre dans les structures hospitalières pour accoucher.

J’ajoute que, dans ces maisons de naissance, l’ambiance serait plus agréable pour la mère et pour l’enfant, d’autant que la mère sera évidemment rassurée par la présence, à proximité immédiate, d’une structure hospitalière de bon niveau. Il suffit d’avoir fréquenté, à un titre ou à un autre, des hôpitaux pour savoir que ce ne sont pas les lieux où l’on se repose le plus. La grossesse et l’accouchement, lorsqu’ils se déroulent bien, n’ont rien à voir avec des pathologies ; ils méritent simplement une surveillance et un accompagnement, ainsi que le respect du calme et du repos dus à une parturiente et à son enfant.

M. le président. La parole est à M. Adrien Giraud, pour explication de vote. M. Adrien Giraud. Je suis, moi aussi, madame la ministre, conduit à vous demander qui est à l’origine de la demande de cette expérimentation des maisons de naissance. Pourquoi ces maisons de naissance sont-elles voulues aujourd’hui par certaines personnes ?

Ce qu’il faut aujourd'hui, c’est plutôt créer des maternités de haut niveau ou améliorer l’équipement des maternités existantes. Et j’en parle en connaissance de cause, car Mayotte peut être considérée comme la plus grande « maternité » de France.

J’ai l’impression, comme beaucoup de mes collègues – car je suis, sur ce point, en désaccord avec le président de mon groupe, Nicolas About –, que, avec ces maisons de naissance, le Gouvernement va mettre le doigt dans un engrenage en quelque sorte idéologique : il faut le dire, certaines femmes ne veulent pas que leur accoucheur soit un homme. Voilà la vérité !

Pour ma part, je considère que les questions idéologiques et religieuses ne devraient pas entrer en ligne de compte lorsqu’il s’agit de la politique à mener en matière de structures d’accouchement et qu’il faut avant tout créer des maternités de qualité et favoriser l’évolution de celles qui existent. M. le président. La parole est à Mme Christiane Demontès, pour explication de vote.

Mme Christiane Demontès. Je suis heureuse que nous ayons un débat de fond sur une question importante.

On peut d’abord se demander, comme Mme Dini tout à l’heure, s’il fallait introduire cet article dans le projet de loi de financement de la sécurité sociale ?

Quoi qu'il en soit, après les propos des uns et des autres, et particulièrement de mes collègues Claire-Lise Campion et Raymonde Le Texier, je vous redis, madame la ministre, notre opposition à ces maisons de naissance telles que vous nous les présentez et notre très grande interrogation sur les raisons qui vous ont poussée à faire cette proposition. On a entendu ici, à ce sujet, un certain nombre de remarques.

Il ne s’agit évidemment pas pour nous de mettre en cause les personnels de santé, quels qu’ils soient, et particulièrement les sages-femmes. Je suis bien placée, en tant que mère, pour savoir combien leur rôle est important dans un grand nombre d’accouchements.

Bien sûr, Claire-Lise Campion l’a dit, il convient de ne pas surmédicaliser l’accouchement, qui est avant tout un acte de vie. Cette dimension humaine doit être prise en compte, et elle ne l’est malheureusement pas toujours. Mais il ne faut pas oublier que des problèmes très sérieux peuvent surgir au cours de l’accouchement, avec une issue parfois tragique.

Je me permettrai, une fois n’est pas coutume, de citer un cas particulier dont j’ai eu récemment connaissance puisqu’il s’agit de la belle-fille de l’un de mes adjoints à la mairie de Saint-Fons. Son accouchement s’est mal passé et l’issue aurait pu être dramatique pour elle, alors qu’elle est âgée de seulement de vingt-cinq ans, qu’elle est en bonne santé, sportive, et que sa grossesse s’était vraiment déroulée dans le bonheur de l’attente. Heureusement, cette jeune femme avait choisi d’accoucher dans la maternité d’un grand hôpital lyonnais, qui a pu et su mobiliser rapidement l’ensemble des moyens pour la sauver.

Selon Jacques Lansac, président du collège national des gynécologues et obstétriciens français, l’accouchement non médicalisé comporte un danger réel dès lors que l’on quitte le cadre du plateau technique des hôpitaux et des cliniques. Le plateau technique implique en effet un appareillage adapté au risque médical estimé pour le fœtus. Il est impossible d’affirmer qu’un accouchement se passera bien avant son terme, insiste-t-il. On n’est jamais à l’abri d’une hémorragie, d’une déchirure du col de l’utérus ou d’une asphyxie du bébé.

Madame la ministre, il n’est pas concevable que tout le travail qui est accompli depuis des années afin d’améliorer la sécurité de la mère et de l’enfant et qui a permis d’enregistrer de vrais progrès en la matière soit mis à mal par la précipitation dont vous faites preuve pour mettre en place ces maisons de naissance.

Trop de questions demeurent : celle, bien sûr, de la prévention pendant la grossesse, pour l’enfant et la mère ; celle du portage de l’investissement relatif à ces structures ; celle de la responsabilité des professionnels et de l’établissement.

Je le dis à mon tour, la position du Gouvernement est absolument paradoxale. D’un côté, madame la ministre, vous avez décidé de fermer des maternités de proximité – notre collègue Annie David citait ce matin le cas du plateau Matésin, dans l’Isère – sous prétexte que celles-ci ne permettaient pas d’assurer la sécurité des femmes et, de l’autre, alors que certaines maternités sont en train de fermer, vous nous proposez ces maisons de naissance. Mais quelle sécurité offriront-elles ?

Ne serait-ce que pour ces raisons-là, je pense décidément qu’il faut supprimer cet article 40. (Applaudissements sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG. – M. Adrien Giraud applaudit également.) M. le président. La parole est à Mme Annie David, pour explication de vote. Mme Annie David. Je vous avoue que je suis vraiment perplexe, madame la ministre, devant cette politique de fermeture des maternités qui n’assurent pas une sécurité suffisante.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Vous n’êtes pas d’accord pour qu’on les ferme ?

Mme Annie David. Non, je n’approuve pas la fermeture de tant de nos maternités. Moi, je serais favorable à la mise en place d’une plus grande sécurité dans ces services. Or vous nous proposez la création de maisons de naissance.

Je me permettrai de revenir sur quelques points, même s’ils ont déjà été évoqués.

Tout d’abord, et je rejoins en cela ce que disait Mme Dini, vous commettez une maladresse en nous proposant cette mesure dans le cadre du projet de loi de financement de la sécurité sociale, avec lequel elle n’a rien à voir : elle aurait dû figurer dans un texte de santé publique. Sauf à admettre, madame la ministre, que son objectif n’était que de faire réaliser des économies à la sécurité sociale… Et là, pour le coup, on ne pourrait absolument pas vous suivre : s’il s’agit de faire des économies sur la santé des mères et de leur nourrisson, c’est plus que mesquin !

Par ailleurs, madame la ministre, vous auriez pu nous donner plus d’explications, notamment sur les conditions dans lesquelles ces maisons de naissance vont être créées et sur leur fonctionnement.

Vous nous parlez des Pays-Bas. Mais, dans ce pays, ces structures n’ont pas un but commercial, me semble-t-il. Or, en France, ce sera différent puisqu’elles ne seront pas créées dans des établissements publics.

Je souhaite également évoquer la démédicalisation des accouchements. À cet égard, vous ne pouvez rien reprocher au groupe CRC-SPG puisque nous avons à plusieurs reprises plaidé pour cette démédicalisation, notamment lors de l’examen de la loi HPST. Je rejoins là Mme Hermange : nous pourrions prévoir, au sein des maternités, un niveau technique tel que tous les accouchements ne soient pas médicalisés à outrance.

Nous avons aussi demandé ici même, au cours de la discussion du texte HPST, que la profession de sage-femme, qui est l’une des quatre professions médicales, voie enfin reconnu son pouvoir de diagnostic et de prescription en matière de suivi des grossesses et de réalisation des accouchements « physiologiques », par opposition aux accouchements « pathologiques ». Puisque vous nous dites que les femmes désirent un accouchement moins médicalisé;…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Certaines !

Mme Annie David. … cela montre bien que nous ne sommes pas dans une posture d’opposition systématique à tout ce que vous suggérez.

Ce qui nous soucie le plus, c’est que, dans ces maisons de naissance, le niveau de sécurité sera insuffisant pour intervenir le cas échéant.

Monsieur About, vous qui êtes médecin, vous savez bien que, à partir du moment où la femme aura commencé le travail dans la maison de naissance, il sera difficile d’agir si un problème survient. Transporterez-vous la patiente en ambulance dans la maternité la plus proche ?

M. Nicolas About. Mais non ! Elle sera attenante ! C’est dans certaines cliniques que les choses se passent aujourd'hui comme cela !

Mme Annie David. Vous avez vous-même dit qu’une femme qui n’a a priori aucun souci peut en avoir au moment de l’accouchement ! Lorsque l’accouchement aura commencé, comment pourra-t-on assurer un bon niveau de sécurité dans la maison de naissance ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Elles seront mitoyennes d’un service de gynécologie-obstétrique !

M. Nicolas About. Nous ferons comme aujourd’hui en chirurgie ! Mme Annie David. Pourriez-vous me laisser parler, monsieur About ! M. Nicolas About. Vous m’interpellez !

Mme Annie David. C’est vous qui m’interpellez, en me disant que ce que je dis n’est pas vrai ; donc je vous réponds !

Vous nous dites aussi, madame la ministre, que de plus en plus de femmes accouchent chez elles. Mais pourquoi le font-elles ? Ce n’est pas toujours par choix !

Je citerai, comme ma collègue Christiane Demontès, un cas qui m’est proche. Une de mes amies a accouché très récemment à son domicile, dans la plus grande panique. Ce sont les pompiers qui l’ont fait accoucher, tout simplement parce qu’elle n’a pas pu se rendre à la maternité. Elle fait effectivement partie de ces femmes qui ont accouché chez elles, mais, croyez-moi, madame la ministre, ce n’était pas sa volonté.

Vous l’aurez compris, même si je milite pour que les femmes puissent accoucher de la façon la plus naturelle possible, la meilleure des solutions serait tout de même d’implanter ces maisons de naissance, si vous tenez absolument à en créer, au sein même de nos maternités, avec une assurance maximale de sécurité pour elles-mêmes et pour leur bébé.

M. le président. La parole est à M. Alain Milon, pour explication de vote. M. Alain Milon. D’abord, ce n’est pas parce qu’on refuse les maisons de naissance qu’on n’est pas favorable à l’accouchement à domicile et que l’on ne veut pas respecter la volonté des femmes d’accoucher chez elles ; à condition, évidemment, que la grossesse permette de croire que l’accouchement se passera bien, ce qui n’est pas toujours le cas.

Actuellement, les maisons de naissance n’existent pas encore, et si des accouchements à domicile ont lieu, c’est bien parce que les médecins acceptent de suivre leurs patientes jusqu’au moment de l’accouchement.

M. About a dit que le bon déroulement de l’accouchement se faisait grâce aux sages-femmes. Bien entendu, il n’est pas question pour nous de prétendre que les sages-femmes ne travaillent pas bien. Elles font un travail admirable, et si, au bout du compte, la feuille de maladie, est signée par le gynécologue-obstétricien, c’est parce qu’elles travaillent sous la responsabilité ou de l’hôpital ou du gynécologue-obstétricien de la clinique.

J’ajouterai que, tout à l’heure, notre collègue Gilbert Barbier a présenté un amendement tendant au dépôt d’un rapport sur la judiciarisation de la responsabilité des gynécologues obstétriciens. Que deviendra, dans le cadre des maisons de naissance, la responsabilité assurantielle des médecins pour celles dont l’accouchement se sera malheureusement mal passé.

En vérité, une grossesse qui se déroule normalement n’aboutit pas obligatoirement à un accouchement qui se passe bien. C’est ce qui arrive la plupart du temps, mais il peut survenir, lors de certains accouchements, une hémorragie de la délivrance, une rupture utérine ou d’autres accidents de ce type.

Si la maison de naissance est adossée à un service de maternité, comme vous l’avez dit, madame la ministre, gardons les maternités et ne faisons pas d’extension ! Sinon, elles peuvent se trouver à vingt minutes d’une maternité…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Aux Pays-Bas !

M. Alain Milon. En cas d’hémorragie de la délivrance ou de rupture utérine, ce n’est même pas la peine de prendre l’ambulance !

M. le président. La parole est à M. Alain Houpert, pour explication de vote. M. Alain Houpert. Comparaison n’est pas raison !

Que je sache, une grossesse dure neuf mois,…

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est un scoop !

M. Alain Houpert. … et, pendant ces neuf mois, on met de la pression sur les médecins, la famille, les parents, on multiplie les examens médicaux, avec des échographies – mon métier consiste précisément à faire des échographies prénatales –, on met en avant la responsabilité par rapport au diagnostic – souvenez-vous de l’amendement « Perruche » – et puis, lors de l’accouchement, on devrait revenir au Moyen-Âge !

Bien sûr, il y a quelques milliers d’années, on accouchait dans les cavernes et certains d’entre vous ont dit qu’ils étaient nés dans le lit de leurs parents. Mais nous sommes au XXIe siècle. Moi, j’ai un fils de cinq ans : heureusement qu’il est venu au monde dans une maternité de niveau 3 ! Sinon, il ne serait pas là aujourd’hui. Et pourtant, la grossesse s’était bien passée.

Nous sommes à l’ère de la technologie, avec des médecins performants. Il ne faut pas revenir en arrière !

M. Guy Fischer. Très bien !

M. le président. La parole est à Mme la ministre.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Ce débat est intéressant.

Mesdames, messieurs les sénateurs, plusieurs d’entre vous ont affirmé, en introduction de leur propos, qu’ils n’étaient pas opposés à la création des maisons de naissance, pas plus qu’au fait de répondre à la volonté exprimée par certaines femmes. (Mmes Raymonde Le Texier et Christiane Demontès opinent.)

Mme Christiane Demontès. Mais pas à n’importe quelles conditions !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Si vous voulez sécuriser encore le dispositif des maisons de naissance, je suis toute prête à en discuter. D’ailleurs, lors du débat à l’Assemblée nationale, j’ai accepté tous les amendements qui allaient dans ce sens.

Je n’ai pas l’intention de vous opposer un quelconque diktat. Il me semble toutefois que, par comparaison aux maisons de naissance dont l’installation se développe dans certains pays voisins, tous les dispositifs de sécurité ont d’ores et déjà été prévus en France.

J’ai bien précisé que ces maisons de naissance devraient être installées dans l’enceinte d’un hôpital, dans un lieu jouxtant un service de gynécologie-obstétrique pour que, à tout moment, en traversant un simple couloir, la future mère puisse être transférée vers une maternité de haut niveau technique.

Mme Christiane Demontès. Ce sont des lits de maternité dont vous parlez !

Mme Annie David. Quel statut auront les personnels ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Une expérimentation sera menée avec la création de cinq maisons de naissance.

M. François Autain. Où seront-elles implantées ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Des appels à projets seront lancés, monsieur le sénateur.

M. François Autain. Qui répondra à ces appels ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Le Gouvernement propose d’ailleurs de financer ces cinq expérimentations à hauteur de 100 000 euros, ce qui explique que les dispositions que nous examinons trouvent leur place dans le PLFSS.

Quant à la structure juridique, qu’il ne me revient pas d’imposer, plusieurs solutions sont possibles selon que la maison de naissance résulte de la volonté d’un l’hôpital, d’une société civile professionnelle de sages-femmes, qui, sur le modèle des maisons médicales de garde, passerait une convention avec l’hôpital, ou d’une association. Quoi qu’il en soit, il m’importe surtout que de tels établissements présentent toutes les garanties de sécurité possibles, qu’il conviendra de déterminer ensemble ainsi qu’avec les professionnels concernés.

J’en reviens aux maternités existantes.

M. Guy Fischer. Il n’y en a pratiquement plus !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Il ne doit plus y avoir de maternités de mauvaise qualité dans notre pays.

La France a déjà le maillage de maternités le plus resserré d’Europe. Cependant, nous ne pourrons pas éviter les accouchements cataclysmiques, notamment de femmes multipares, qui peuvent mettre au monde leur enfant une dizaine de minutes après le début du travail. (M. Gilbert Barbier acquiesce.) M. François Autain. Les pompiers sont formés pour gérer ces situations.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Les médecins membres de cette assemblée ne me contrediront pas : on ne pourra pas empêcher que des femmes accouchent sur le trottoir, dans un supermarché ou dans la voiture des pompiers ! D’aucuns ont évoqué également la très légère hausse de la mortalité infantile en 2009. C’est un autre sujet, mais quelques pistes permettent d’expliquer ce phénomène, notamment la mortalité infantile outre-mer, qui pose un vrai problème.

À cet égard, j’ai écouté attentivement les propos de M. Giraud sur le fait religieux à Mayotte…

Mme Raymonde Le Texier. Pas seulement à Mayotte !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. … qui vont plutôt dans mon sens : si nous pouvions fournir une offre alternative, moins médicalisée, avec des sages-femmes exerçant au sein d’une maison de naissance, nous arriverions peut-être à prendre en charge un plus grand nombre de mères.

La mesure que je propose est parfaitement cohérente avec le fait d’assurer un haut niveau de sécurité dans les maternités.

Ainsi, alors que le maillage de maternités est beaucoup plus resserré en France qu’en Suède, où la distance qui sépare un foyer d’une maternité peut atteindre cent kilomètres, notre pays connaît un nombre d’hémorragies du post-partum plus élevé, car il a choisi de maintenir certaines maternités de moindre qualité. Ce fait est dramatique ! Lorsqu’un problème survient au cours d’un accouchement, il faut disposer d’un service de réanimation à proximité, aussi bien pour la mère que pour l’enfant.

La création des maisons de naissance ne s’oppose d’ailleurs nullement à cette nécessité, à condition que de telles structures soient attenantes à une maternité de très haut niveau.

Ce faisant, je réponds aux préoccupations de Marie-Thérèse Hermange : il est tout à fait logique d’exiger des maternités de haut niveau technique. Mais pourquoi ne pas développer juste à côté, voire dans leurs murs, une offre alternative ?

Mme Christiane Demontès. Dans ce cas, pourquoi supprimer des lits de maternité ?

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. L’offre de lits dans les maternités est très largement suffisante dans notre pays, madame la sénatrice. (Protestations sur les travées du groupe socialiste et du groupe CRC-SPG.) Le Gouvernement veut développer une offre expérimentale, alternative, qui répondra à des normes fixées par la Haute Autorité de santé, que l’on pourra arrêter à tout moment et qui fera l’objet d’un bilan.

Il me semble que nous apportons d’ores et déjà toutes les garanties de sécurité. Mais si, à partir du cahier des charges qui sera déterminé par la Haute Autorité de santé – vous voudrez bien reconnaître, mesdames, messieurs les sénateurs, que cette instance n’est pas spécialement réputée pour son laxisme en matière de sécurité – vous souhaitez faire des propositions pour sécuriser encore le dispositif que je vous soumets, je suis toute prête à les examiner.

Vous prétendez que vous n’êtes pas opposée aux maisons de naissance, madame David. Mais qu’avez-vous à me proposer ?

Mme Annie David. Je vous l’ai déjà dit : un statut public au sein d’une maternité !

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. Je ne sache pas que le statut public garantisse nécessairement une moindre mortalité infantile. Soyons sérieux : je faisais référence à des normes techniques.

Je le répète une dernière fois : cette expérimentation se déroulera à l’intérieur de l’hôpital public, dans des locaux attenants à une maternité de bon niveau. Finalement, la question est de savoir s’il est encore possible de faire évoluer, ne serait-ce qu’à la marge, notre système de santé pour y introduire quelques innovations.

M. le président. La parole est à M. Guy Fischer, pour explication de vote. (Protestations sur les travées de l’UMP.)

M. Guy Fischer. Je citerai un exemple que je connais bien pour montrer que la création des maisons de naissance n’est pas sans lien avec les restructurations et le démantèlement du service public hospitalier. (Mme la ministre marque son désaccord.)

Nous avions, à Lyon, un petit bijou : l’hôpital pour enfants Debrousse, situé sur la colline, au sommet de la montée de Choulans. Or, dans le cadre de la restructuration des Hospices civils, on a créé, pour optimiser les moyens, l’hôpital mère-enfants de Bron. En réalité, on a accouché d’un monstre ; je constate aujourd’hui que certains services de cet hôpital, qui regroupe pourtant les équipes les plus prestigieuses de la région, sont entièrement fermés faute de moyens.

Mme Roselyne Bachelot-Narquin, ministre. C’est absurde, dès lors que s’applique la tarification à l’activité !

M. Guy Fischer. Je constate aussi que, non loin de cet établissement, a été édifiée une clinique répondant au nom de Natecia. Je croyais que celle-ci était spécialisée dans les grossesses à risques. Je me suis aperçu, en réalité, qu’il n’en était rien et que, en cas de problèmes, les patientes étaient transférées vers l’hôpital mère-enfants.

Ainsi, d’un côté, on rationalise et, de l’autre, on crée des cliniques destinées à prendre en charge des grossesses sans histoire, ces établissements venant concurrencer les hôpitaux Édouard-Herriot et Jean-Mermoz. Croyez-moi, mes chers collègues, ces structures fleurissent un peu partout dans l’agglomération lyonnaise !

M. Nicolas About. Vous oubliez que Natecia est le fruit du regroupement de trois cliniques…

M. le président. Je mets aux voix les amendements identiques nos 121, 252, 316 rectifié, 355 et 495 rectifié.

(Les amendements sont adoptés.)

M. le président. En conséquence, l'article 40 est supprimé et les amendements nos 372 rectifié et 496 n'ont plus d'objet.

Article rétabli par la commission mixte paritaire, 18 novembre

Extraits des comptes rendus des débats

Expérimentation des maisons de naissance

Mme Bérengère Poletti, députée. Je propose de rétablir l’expérimentation des « maisons de naissance ». Je suis consciente que c’est un sujet délicat, mais nous devons prendre en compte la demande de certaines femmes, qui veulent un accouchement plus naturel et physiologique, face à la tendance à l’hypermédicalisation de la naissance ; en l’absence de dispositif d’encadrement, ces femmes se laissent parfois attirer par des propositions vraiment dangereuses. Les maisons de naissance, telles que nous les proposons, seront en mesure de leur proposer un environnement tout à la fois naturel et sécurisé.

M. Jean-Pierre Door, député. Je soutiens également cette démarche. Je sais que certains voient dans les maisons de naissance le risque que certaines maternités ne soient fermées et plus généralement un retour en arrière, mais la demande exprimée par les femmes doit être prise en considération. Nous proposons le retour au texte adopté par l’Assemblée nationale, qui avait apporté un certain nombre de garanties par rapport au texte initial du Gouvernement : chaque maison de naissance devra être attenante à une maternité, avec laquelle elle devra passer une convention. Et si d’autres garanties doivent être apportées, comme une intervention de la Haute Autorité de santé (HAS), pourquoi pas ? Ce sera de toute façon une expérimentation bien cadrée ; on envisage la mise en place de cinq maisons de naissance.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat. Le Sénat a très largement rejeté le principe de cette expérimentation. Les garanties apportées par l’Assemblée nationale n’ont pas suffi à rassurer l’ensemble des sénateurs. Je me dois donc, à ce stade de la discussion, de donner un avis défavorable à son rétablissement, même si à titre personnel, j’avais considéré, en tant que rapporteur, que cette mesure était acceptable, sous réserve d’en renforcer encore la sécurité. En conséquence, si la commission mixte paritaire devait s’orienter vers le rétablissement de l’article 40, je proposerais des sous-amendements.

M. Yves Bur, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Je suis favorable au rétablissement de l’expérimentation des maisons de naissance, car cela répond aux aspirations des femmes et un encadrement strict est prévu. En outre, le rapprochement qui est demandé entre ces maisons et les services d’obstétrique pourrait encourager ces services à participer à l’expérimentation.

Mme Marisol Touraine, députée. La position du groupe SRC a évolué pendant les débats. Nous n’avons jamais été opposés au principe des maisons de naissance, mais étions très inquiets sur leur encadrement. Au terme de ces débats, nous avons obtenu des garanties sérieuses dans plusieurs domaines. Tout d’abord sur la sécurité : il fallait éviter que l’on ne distingue a priori des grossesses qui seraient « à risque » et des grossesses qui ne le seraient pas ; l’adossement obligatoire des maisons de naissance à une maternité évitera ce travers. La deuxième crainte que nous avions portait sur le risque de fermeture de maternités de proximité ; à cet égard, la comptabilisation de l’activité des maisons de naissance au titre de leur maternité d’adossement évitera ce risque. Enfin, il s’agit d’une expérimentation qui sera surveillée et évaluée. Dans ces conditions, nous pouvons l’accepter.

M. André Lardeux, sénateur. Je reste sur ma position défavorable. Est-il besoin d’une loi pour créer ce qui apparaît comme une maternité « bis » au sein même des hôpitaux ; s’agit-il en fait d’y avoir, d’une part, des lits de maternité médicalisés, d’autre part, des lits de maternité non médicalisés ? De surcroît, je n’ai pas réussi à identifier tous les groupes de pression qui défendent le principe des maisons de naissance, dont certains, je le crois, présentent un caractère religieux.

M. Bernard Cazeau, sénateur. Il y a un groupe de pression qui est certain, c’est celui des sages-femmes. La position prise par le Sénat a été fondée sur des arguments que je rappelle : les dangers pour la sécurité des femmes ; le risque que cela n’accélère la fermeture de maternités. Au regard de ce qui vient d’être dit, notre position peut évoluer. L’intégration des maisons de naissance dans les maternités pourrait permettre de réaliser des économies.

M. Guy Fischer, sénateur. Pour ma part, je reste fidèle à la position choisie par le Sénat. Nous devons faire attention à tout ce qui concerne les maternités : la fermeture des petites maternités a souvent été le préalable à toutes les mesures de restructuration des pôles hospitaliers que nous déplorons. En outre, la rédaction qui nous est proposée laisse de nombreux points d’incertitudes : quel financement ? Quelle rémunération des actes ? Quelle optimisation des moyens ?

Mme Catherine Lemorton, députée. Pourquoi André Lardeux a-t-il évoqué un aspect « religieux » de la question ?

M. André Lardeux, sénateur. Je crains que ce type d’alternative aux maternités classiques ne soit l’occasion d’aller vers une médecine où des femmes pourraient refuser d’être examinées et traitées par des professionnels de sexe masculin.

M. Philippe Vitel, député. J’étais au départ hostile à cette expérimentation. J’ai fait, depuis, quelques recherches sur internet. Au Québec, par exemple, malgré une législation beaucoup plus souple que celle que nous envisageons, il n’y a apparemment que six structures du type « maison de naissance ». L’enjeu me semble donc assez marginal et je crois que nous pouvons approuver cette expérimentation très bien encadrée.

M. Guy Lefrand, député. Je me suis moi-même opposé à cette expérimentation lorsque nous en avons débattu à l’Assemblée nationale, mais les nouvelles garanties qui nous sont apportées me rassurent : en particulier, l’adossement obligatoire des maisons de naissance à une maternité existante empêchera qu’elles ne remplacent une maternité qui aurait été supprimée et la comptabilisation des naissances au titre de cette maternité d’adossement évitera que l’on ne prétexte de sa baisse d’activité pour la fermer.

Mme Muguette Dini, sénatrice, vice-présidente. J’ai fait partie au Sénat de la minorité qui était favorable à cette expérimentation. Je voterai naturellement pour son rétablissement.

M. Alain Vasselle, rapporteur pour le Sénat. La mesure ne peut être acceptée qu’avec un encadrement important. Cependant, nous devons faire attention à ne pas recréer, à force de rajouter des contraintes, une sorte de nouveau type de maternité de niveau 1. Je crois que nous aurions intérêt à nous déplacer à l’étranger pour voir les expériences des uns et des autres ; d’après ce que j’en sais, il n’y a pas de réels problèmes.

Je vous propose d’apporter une garantie supplémentaire au dispositif qui nous est proposé, consistant à inscrire ces expérimentations dans un cahier des charges défini par la Haute Autorité de santé, laquelle donnerait également un avis conforme à la liste des maisons de naissance expérimentales.

M. Yves Bur, rapporteur pour l’Assemblée nationale. Je crois que nous pouvons tous être rassurés. La proposition de M. Vasselle va compléter les nombreuses garanties et on peut compter sur nos administrations sociales pour bien contrôler le dispositif. Nous avons aussi la chance, en France, d’avoir des sages-femmes très compétentes, ce qui n’est pas le cas partout.

M. Bernard Cazeau, sénateur. Compte tenu des nombreux aménagements qui sont proposés, notamment l’obligation d’adossement à une maternité et l’intervention de la Haute Autorité de santé, je crois que la position de mon groupe peut évoluer.

La commission mixte paritaire adopte le sous-amendement et l’amendement et l’article 40 est ainsi rédigé.

Article supprimé par le Conseil constitutionnel (16 décembre 2010)

Article 40 devient "article 67"

Article 67

Après l'article L. 6122-18 du même code, il est rétabli un article L. 6122-19 ainsi rédigé :

« Art. L. 6122-19. - À partir du 1er septembre 2011 et pendant une période de deux ans, le Gouvernement est autorisé à engager l'expérimentation de nouveaux modes de prise en charge de soins aux femmes enceintes et aux nouveau-nés au sein de structures dénommées : «maisons de naissance», où des sages-femmes réalisent l'accouchement des femmes enceintes dont elles ont assuré le suivi de grossesse, dans les conditions prévues aux articles L. 4151-1 et L. 4151-3. Ces expérimentations ont une durée maximale de cinq ans. Elles sont réalisées en conformité avec un cahier des charges adopté par la Haute Autorité de santé.

« À cet effet, il est dérogé aux articles L. 1434-2, L. 1434-7 et L. 6122-1.

« Les maisons de naissance ne sont pas des établissements de santé au sens de l'article L. 6111-1 et ne sont pas soumises au chapitre II du titre II du livre III de la deuxième partie.

« Le décret en Conseil d'État visé au dernier alinéa du présent article précise notamment que la maison de naissance doit être attenante à une structure autorisée à l'activité de gynécologie-obstétrique avec laquelle elle doit obligatoirement passer une convention.

« L'activité de la maison de naissance est comptabilisée avec celle de la structure autorisée à l'activité de gynécologie-obstétrique autorisée attenante.

« Il peut être dérogé aux dispositions du code de la sécurité sociale relatives aux modalités d'application de la prise en charge de certains actes inscrits sur la liste prévue à l'article L. 162-1-7 de ce même code.

« Par dérogation à l'article L. 162-22-13 du même code, les dépenses nécessaires au fonctionnement des maisons de naissance peuvent être prises en charge en tout ou partie par la dotation annuelle prévue à l'article L. 162-22-14 du même code.

« Les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale arrêtent, après avis conforme de la Haute Autorité de santé, la liste des maisons de naissance autorisées à fonctionner à titre expérimental en fonction notamment de l'intérêt et de la qualité du projet pour l'expérimentation et de son intégration dans l'offre de soins régionale en obstétrique. La suspension de fonctionnement d'une maison de naissance inscrite sur la liste peut être prononcée par le directeur général de l'agence régionale de santé pour les motifs et dans les conditions prévues par l'article L. 6122-13 du présent code. Le retrait d'inscription à la liste est prononcé par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en cas de manquement grave et immédiat à la sécurité ou lorsqu'il n'a pas été remédié aux manquements ayant motivé la suspension.

« Un premier bilan de l'expérimentation est établi au 31 décembre 2014 par les ministres chargés de la santé et de la sécurité sociale en vue de la poursuite ou de l'abandon de l'expérimentation. Le Gouvernement adresse au Parlement un bilan définitif de l'expérimentation dans l'année qui suit sa fin.

« Les conditions de l'expérimentation et notamment les conditions d'établissement de la liste susmentionnée, les conditions de prise en charge par l'assurance maladie de la rémunération des professionnels, les conditions spécifiques de fonctionnement des maisons de naissance ainsi que les modalités d'évaluation de l'expérimentation à son terme sont fixées par décret en Conseil d'État. »

Abrogation

http://www.conseil-constitutionnel.fr/conseil-constitutionnel/francais/les-decisions/acces-par-date/decisions-depuis-1959/2010/2010-620-dc/decision-n-2010-620-dc-du-16-decembre-2010.51515.html

Sont déclarées contraires à la Constitution les dispositions suivantes de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2011 : le paragraphe V de l'article 13 ;

  • - l'article 51 ;
  • - les articles 56 à 58 ;
  • - l'article 67 ;
  • - l'article 69 ;
  • - l'article 71 ;
  • - les articles 73 à 76 ;
  • - l'article 83 ;
  • - l'article 86 ;
  • - les articles 105 à 107 ;
  • - l'article 111 ;
  • - l'article 113.

... 18. Considérant que ces dispositions n'ont pas d'effet ou ont un effet trop indirect sur les dépenses des régimes obligatoires de base ou des organismes concourant à leur financement ; que, par suite, elles ne trouvent pas leur place dans une loi de financement de la sécurité sociale ; ...


Modif. June 22, 2013, at 02:51 PM<br />(:addThis username="xa-4b5388e32c732dfe" btn="lg-share":)

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