Un franc suc­cès pour l’en­quête CIANE

Télécharg­er le com­mu­niqué (pdf ) CPRe­sul­tat­sEn­quete

L’enquête CIANE a ren­con­tré un franc suc­cès dès son lance­ment, puisque 4400 femmes ont com­plété le ques­tion­naire entre le 29 févri­er et le 24 mars 2012. Elle four­nit par ailleurs des résul­tats tout à fait con­cor­dants avec ceux de l’enquête nationale péri­na­tale de 2010 sur les taux de césari­enne après ten­ta­tive de voie basse (10%), d’épisiotomie (44% chez les prim­i­pares, 17% chez les mul­ti­pares), d’extraction instru­men­tale (15%) et de déclenche­ment (22%). 64% des répons­es con­cer­nent des accouche­ments qui ont eu lieu entre 2009 et 2012 (28% entre 2005 et 2008; et 8% avant 2005); sauf indi­ca­tion con­traire, les chiffres don­nés plus bas sont cal­culés sur la péri­ode 2009–2012.

Une pre­mière analyse sur le déclenche­ment et l’ac­céléra­tion du travail
Par­tant sur ces résul­tats encour­ageants, le CIANE a décidé de se livr­er à une pre­mière analyse des don­nées sur le thème du déclenche­ment et de l’accélération du tra­vail : ce sujet a récem­ment été mis sur le devant de la scène suite à la pub­li­ca­tion d’un arti­cle dans le BMJ Open d’une équipe de l’Inserm (1) mon­trant un lien entre accéléra­tion du tra­vail et hémor­ragie du post-par­tum, et qui devrait être suivi dans les prochains mois d’un autre arti­cle sur les liens entre hémor­ragie du post par­tum et déclenchement.

Des lacunes majeures en matière d’information et de recueil du consentement
Un tiers des femmes dont l’accouchement a été déclenché dis­ent ne pas avoir reçu d’information sur le déclenche­ment, les raisons jus­ti­fi­ant d’y recourir, les con­di­tions recom­mandées pour le pra­ti­quer ; 36% d’entre elles dis­ent ne pas avoir été sol­lic­itées pour don­ner leur consentement.
La lec­ture des témoignages qu’elles ont lais­sés per­met de pré­cis­er le tableau : beau­coup de femmes con­sid­èrent que si elles avaient été cor­recte­ment aver­ties des con­séquences pos­si­bles du déclenche­ment, elles s’y seraient opposées ; un cer­tain nom­bre d’entre elles font état de pra­tiques inac­cept­a­bles puisque, non seule­ment on ne leur demande pas leur con­sen­te­ment mais elles ne sont même pas infor­mées du déclenche­ment avant sa réalisation.

Une admin­is­tra­tion d’o­cy­tocine en par­tie à l’in­su des femmes
En ce qui con­cerne l’accélération du tra­vail, une analyse rigoureuse des don­nées per­met de penser que l’administration d’ocytocine se fait à l’insu des femmes dans près d’un tiers des accouche­ments non déclenchés. Cepen­dant même celles qui ont été infor­mées de l’administration d’ocytocine n’ont pas, et de loin, tou­jours pu exprimer leur accord: 55% d’entre elles dis­ent que l’on n’a pas demandé leur consentement.

Davan­tage d’in­ter­ven­tions et une moin­dre satisfaction
Les accouche­ments déclenchés sont aus­si asso­ciés à une aug­men­ta­tion sig­ni­fica­tive des autres inter­ven­tions : taux de césari­enne mul­ti­plié par 2,4 ; 30% d’épisiotomie en plus, 50% de forceps/ ventouse/ spat­ules en plus (sur l’ensemble des accouche­ments toutes dates con­fon­dues). Par ailleurs, tant le déclenche­ment que l’administration d’ocytocine sont asso­ciés à une dégra­da­tion de la manière dont les femmes vivent leur accouche­ment (toutes dates con­fon­dues) : les femmes ayant subi l’une ou l’autre de ces inter­ven­tions sont pra­tique­ment deux fois plus nom­breuses que les autres à dire qu’elles ont plutôt mal ou très mal vécu leur accouche­ment (aux alen­tours de 30% / 15%).

Pour une éval­u­a­tion des pra­tiques de déclenchement
Notons enfin que les déclenche­ments sont jus­ti­fiés par les pro­fes­sion­nels à 34% par des dépasse­ments de terme, à 62% par d’autres raisons médi­cales, à 2% par des raisons d’organisation. 2% des femmes seule­ment deman­dent à être déclenchées pour des raisons per­son­nelles. Autrement dit, 20% de l’ensemble des accouche­ments seraient déclenchés pour des motifs médi­caux, ce qui paraît impor­tant : une exten­sion des études menées en 1999 par Goffinet et al. (2), puis en 2003 (3) – qui ont con­clu à l’importance des pra­tiques de déclenche­ment con­traires aux don­nées de la sci­ence – sur les raisons qui poussent au déclenche­ment nous paraît à ce stade néces­saire. Il est en effet temps d’évaluer sere­ine­ment la pra­tique du déclenche­ment: il est pos­si­ble qu’elle per­me­tte d’éviter cer­taines césari­ennes, mais dans d’autres cas elle induit prob­a­ble­ment des inter­ven­tions inutiles.

Met­tre à niveau l’in­for­ma­tion, une con­di­tion du dia­logue femmes — professionnels
Plus glob­ale­ment, des actions doivent être entre­pris­es sans délai pour qu’une infor­ma­tion con­ven­able, con­forme a min­i­ma aux recom­man­da­tions de la HAS sur le déclenche­ment (4) et à celles du Col­lège Nation­al des Gyné­co­logues Obstétriciens Français sur le dépasse­ment de terme (5), soit délivrée aux femmes et pour qu’un véri­ta­ble dia­logue puisse se nouer entre pro­fes­sion­nels et par­turi­entes per­me­t­tant à ces dernières de par­ticiper aux déci­sions de soin qui les concernent.

Pour en savoir plus: télécharg­er le rap­port d’enquête

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Références
(1) Oxy­tocin dur­ing labour and risk of severe post­par­tum haem­or­rhage: a pop­u­la­tion-based, cohort nest­ed case–control study. Bel­ghi­ti J et coll. BMJ Open 2011;1:e000514 doi:10.1136/bmjopen-2011–000514 arti­cle

(2) Goffinet, F., Hum­bert, R., Cler­son, P., Philippe, H.-J., Bréart, G., Cabrol, D. Enquête de pra­tique nationale aupres des obstétriciens sur le déclenche­ment arti­fi­ciel du tra­vail (1999) Jour­nal de Gyné­colo­gie Obstétrique et Biolo­gie de la Repro­duc­tion, 28 (4), pp. 319–329.

(3) Goffinet F, Drey­fus M, Car­bonne B, Magnin G, Cabrol D. Enquête des pra­tiques de mat­u­ra­tion du col et de déclenche­ment du tra­vail en France (2003) Jour­nal de Gyné­colo­gie Obstétrique et Biolo­gie de la Reproduction;32(7):638–46. Doi : JGYN-11–2003-32–7‑0368–2315-101019-ART8

(4) Recom­man­da­tion HAS 2008 Déclenche­ment arti­fi­ciel du tra­vail à par­tir de 37 semaines d’amén­or­rhée Texte de la recommandation

(5) Recom­man­da­tions CNGOF 2011 Grossesse pro­longée et terme dépassé Texte de la recommandation